Prurient: You Show Great Spirit

Tu es jeune, tu es mélomane, tu aimes ton époque, il y a de grandes chances que tu aies au moins un disque de Prurient à la maison. Si tu as une compagne, un compagnon, un animal de compagnie ou un enfant, il y a de grandes chances aussi que tu ne l'écoutes jamais. Personne ne peut t'en blâmer, les disques de Prurient sont tous frontalement éprouvants ou volontairement nuisibles pour le corps humain, et tu as des stéréocils à protéger. C'est que jusqu'au presque délicat Bermuda Drain, Dominick Fernow preservait son projet le plus dur comme un sanctuaire d'ultraviolence, réservant tentations d'aller voir ailleurs à Vatican Shadow, projet compliqué et très discuté de proto-techno parano obnubilé par les exactions de la CIA dans les Balkans, en ex URSS et au Moyen-Orient. Mais peut-être lassé par le harsh noise pour de bon, il abandonne aujourd'hui Prurient à un no man's land synthétique qui n'a plus de harsh que l'ambiance (et quelques tout petits oripeaux de feedbacks en arrière-plan). Ce qui veut dire que vous pouvez l'écouter tranquillou avec bébé à côté.

Evolution à pleurer ou à célebrer, on ne saurait trancher mais "You Show Great Spirit" est un superbe symptôme. Quelque part entre les cieux étendus du synth underground (Emeralds etc.) et les ambiances technoir, très cuir de plein de machins néo-EBM (dont Cold Cave, auquel Fernow participe depuis quelques années), son arpège de synthé a déjà été entendu 25 fois mais a rarement resonné avec autant de ferveur adolescente. Devenu havre de sepulcre de tous les noiseux un peu dandy du moment, le Blackest Ever Black des gens de Raime sort Through the Window incessamment sous peu, en LP et CD.