En d'autres lieux, d'autres temps, ce disque de Raspberry Bulbs aurait vu le jour de manière locale et confidentielle, sur un label engagé comme Havoc ou Amphetamine Reptile; il aurait été pressé à moins de 500 exemplaires, dont une bonne moitié aurait été mise à disposition du groupe pour qu'il l'écoule à la sortie des concerts donnés dans les 3 états limitrophes de son état natal; surtout, il aurait exclusivement été disponible chez quelques disquaires caractériels ou via des mail-orders où son titre aurait eu tout le mal à du monde à émerger de blocs de texte interminables mal photocopiés en caractères minuscules sur du papier jauni.
Mais nous sommes en 2014, le disque sort sur Blackest Ever Black, un label autant capable de sortir du dark ambient que de la musique improvisée ou le prochain disque de Tomas More, il sera sans doute pressé sur vinyle 180 grammes disponible chez Urban Outfitters et la masse informe de son public potentiel comprend une bonne dizaine de publics aux contours eux mêmes de moins en moins perceptibles, qui vont de la niche des hardcoreux par intermittence à l'intelligentsia black metal qui collectionne les cassettes et qui n'a jamais entendu une note d'Anorexia Nervosa.
Est-ce que c'est une bonne chose, ou une mauvaise? A l'instar de l'épineux problème des boutiques de musée qui vendent des saladiers design, on est un peu en peine de trancher mais on a notre petite idée; surtout, on est touchés par l'aplomb avec lequel Marco del Rio, ancien blast-beateur sous le nom de "He Who Crushes Teeth" au sein du duo black metal / crust Bone Awl, refuse les étiquettes (punk, black metal, whatever) et préfère lister des influences littéraires (Lovecraft, Arthur Machen) quand il pond une déchirade du genre de celle que vous pouvez écouter ci-dessous. Privacy, le deuxième album de Raspberry Bulbs, sort mi-novembre.
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