D'après ce que j'ai compris, l'unique cassette du Ghanéen Ata Kak file des sueurs froides à Internet depuis un bon moment. Achetée à un vendeur ambulant de Cape Coast par Brian Shimkovitz d'Awesome Tapes from Africa pendant un voyage au Ghana en 2002 puis téléversée dans la foulée sur divers audioblogs pendant la parenthèse des audioblogs enchantés, Obaa Sima a même fait l'objet d'un reportage audio sur la BBC en juin dernier, qui conte la quête du digger américain pour retrouver la trace du mystérieux auteur de la mystérieuse cassette.
Quête qui a abouti d'ailleurs, puisque l'album reparaît en mars prochain, via Awesome Tapes, avec sa bénédiction et une salve d'images inédite et d'infos biographiques inédites:
"Né le 29 septembre 1960 à Kumasi au Ghana, Atta-Owusu (alias Ata Kak) ne semblait pas prédestiné à la musique. Après ses études il aide son père à tenir un bar au Kumasi Golf Club avant de partir en Allemagne rejoindre sa femme. Il y prend des cours d’Allemand et espère rejoindre l’université, mais sa femme tombe enceinte d’un premier enfant, Kevin, et il se met à travailler dans les champs, comme professeur d’anglais... Dans le même temps il écoute Stevie Wonder, The Staples Singers, Michael Jackson… Il apprend la musique sur le tard et devient, par hasard, batteur de batterie dans un groupe de reggae. Atta décolle pour Toronto en 1989 où il joue dans un groupe de highlife, Majirata, qui sortira trois albums. Il donne également des cours de musique à l’église et travaille en tant que chef cuisinier. Vers la fin de l’année 1991, il commence l’écriture de ses propres morceaux. Sentant que son groupe ne serait pas à l’aise avec ses compositions et n’ayant pas l’argent pour financer un studio, il assemble du matériel pour les enregistrer chez lui, avec l’aide de son ami Yanson Nyantakye."
Maintenant la question qui tue: est-ce la musique que contient cette cassette, publiée au Ghana au coeur des années 90 sans faire de vagues (Shimkovitz explique lui-même qu'aucun de ses amis ghanéen n'avait entendu parler de cette "folie de rap leftfield frénétique" avant qu'il ne leur fasse écouter) justifie cet emballement?
La réponse, qui apparaîtra évidente à n'importe quel auditeur suffisamment appareillé pour apprécier un bon beat et un peu d'excentricité, est dans les quelques extraits ci-dessous, remasterisés à l'arrache par quelques amateurs en attendant la réédition officielle. En d'autres termes pour ceux qui n'ont pas le temps de cliquer: ce truc défonce.
Au carrefour du rap chamanamana, de la house de Chicago (mais ouais!) et de divers sous-genres du highlife et de la pop d'Afrique occidentale qu'on serait bien en peine de devoir identifier devant un jury de pairs ethnomusicologues, Ata Kak pose surtout en Twi sur ses instrus déments de groove d'une manière totalement alien et addictive... Suffisamment en tout cas pour que l'auditeur occidental éberlué en fasse l'emblême d'une conversation privilégiée entre ce petit pays d'Afrique anglophone et la pop électronique d'Amérique et du Royaume-Uni. On donne rendez-vous le 2 mars chez leur disquaire préféré à tous ceux qui savent que certaines choses sont trop bonnes pour n'être appréciées qu'au détour d'un clic sur Youtube. On peut maintenant l'écouter en entier via Noisey.
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