Yoshinori Hayashi "Madam Moo" (Going Good)
Ce maxi est tellement bon qu'on a un peu l'impression, en l'écoutant, qu'il dessine le futur de la deep house. On exagère bien sûr un peu (c'est écrit dans la convention collective des journalistes du web) mais ce premier maxi mi groovy mi abstrait as hell du tokyoïte Yoshinori Hayashi remporte plusieurs défis dont celui très appréciable pour les gens qui ont écouté un peu trop de jazz rock dans leur jeunesse (quoi, quoi?) de faire quelque chose de beau - que dis-je, de sublime! - avec le solo de saxo soprano romantique façon Kenny G ou Wayne Shorter sur le retour. Comment ça c'est presque rien? Mais la musique c'est tout ou rien, ma bonne dame.
Paul Woolford "MDMA" (Hotflush)
Aucune idée de si Woolford veut faire un hymne ou une satire de ce truc, s'il cherche à réhabiliter en premier l'acid house ou le speed garage ni si c'est de l'art ou du cochon mais on est plutôt satisfait qu'il retourne à ses grandes ambitions commerciales parce que la house anglaise depuis l'avènement de Disclosure, ben c'est pas ben marrant.
Huerco S. "Rushing to Paradise" (Proibito)
Etonnant choix de titre ("course vers le paradis") pour ce gros nuage de vapeur toxique qui tourne sans snare ni charley autour de 110 BPM, soit à la vitesse d'une charette de fortune tirée vaillamment par un bourricot à l'article de la mort sur un chemin de montagne caillouteux. Ou alors le "rush" en question est d'ordre plus "virtuel" et "mental" et a plus à voir avec l'absorption par l'organisme d'une substance chimique ingurgitée, injectée ou aspirée à but récréatif dans le contexte d'un rassemblement festif autour d'une musique de facture électronique à rythme répétitif, qui sait?!
Leonardo Martelli "Filippo" (Antinote)
Encore une référence Antinote, encore une découverte, encore un truc délicieux mais super syncrétique et impossible à résumer sans se lancer dans une liste d'apothicaire. Dans "Filippo" par exemple, il y a du downtempo de Detroit, de l'acid du nord de l'Angleterre, de l'electro robot guerrilla de Rotterdam et même un peu d'air sec en provenance de la côte adriatique pour contredire tout ça. Et encore, on vous parle pas des 3 autres morceaux sur le maxi.
Jack J "Thirstin'" (Future Times)
Déjà repressé deux fois depuis sa sortie il y a quelques semaines, ce petit hit instantané du pilier de Mood Hut Jack Jutson (également membre des Pender Street Steppers) fait effectivement beaucoup de bien au coeur. Pourtant presque tout y est très classique, du petit riff de rhodes placide au tapis de congas en passant par la basse électrique jouée la clope au bec... Jusqu'à l'arrivée du gimmick de voix à cinq ou six notes qui fait toute sa sève, et dont on n'arrive pas à comprendre si son emprise sur l'auditeur tient à la manière dont il lui masse le cuir chevelu ou se fout de lui. On pense évidemment à ce bon vieux Barney de New Order, qui n'est jamais bien loin quand un petit blanc chante de la house sans faire semblant d'être noir.
Bernard Badie "Beat Down" (Mojuba)
Ne pas se fier à la facture des drums - presque UK Garage - ni à la modernité très "ordinateur" du filtre sur la boucle principale: on a bien affaire à un petit maître de Chicago, dont les premiers pas se sont faits sur Cajual et qui a même sorti un album sur le Distance de Jean "La Lambada" Karakos à la fin des années 90. Très enlevé et très bien senti, "Beat Down" s'écoutera donc moins comme une bêtise postmoderne à télécharger sur Beatport que comme une résurgence improbable de la house filtrée dans son fief d'origine, 15 ans après la fin de la French Touch et les dernières bêtises intéressantes de DJ Sneak.
U "Your Place" (Technicolour)
Promis juré, ce truc qui commence comme une purée de pois south londonienne n'est pas un miroir aux alouettes à la Actress: au moment précis où le compteur passe 2 minutes 10, le beat devient suffisamment droit et massif pour justifier la présence de "Your Place" dans un Panier de crabes. Rappelons en outre ue le mystérieux U joue également dans BTU, trio signé sur le Phantasy Sound d'Erol Alkan. On en reparlera sans doute beaucoup en 2016.
Romans "Delmenium" (The Bunker New York)
Il y a quelque chose d'étonnamment incarné, de franchement grandiose et - disons-le tout net - d'éminemment Detroitien dans ce premier maxi à quatre mains de Gunnar Haslam et Tin Man. Normal me direz-vous puisqu'un maxi techno sur deux qui sort dans le monde en 2015 a quelque chose à voir avec UR ou Kevin Saunderson. Il n'empêche que là l'hydromel originel est particulièrement bien regurgité par les deux gaillards, qui font quelque chose de très émouvant et de presque spirituel avec les nappes et les sirènes.
Tambien "Ondule" (Kitjen)
Plus joli titre de la semaine et étonnante épaisseur pour cette deuxième référence du label stuttgartois Kitjen. Enième hommage au mythique E2-E4 de Manuel Gottsching, "Ondule" joue sur l'hypnose et les effets d'attente avec une finesse qu'on a plus l'habitude d'entendre chez les post-rockers teutons monacaux (Kreidler ou le Tolouse Low Trax de Detlef Weinrich notamment) que chez les artisans house et nous envoie au septième ciel quand il lance les mélodies à 2 minutes de sa conclusion. A ranger aux côtés des dernières références Magazine histoire de réaliser qu'il se passe vraiment quelque chose de très chouette au royaume de la house allemande après le déclin de l'empire Kompakt.
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