En deux ans d’existence de notre petite entreprise en ligne, légions furent les groupes qui tentèrent avec nous et face à nos caméras de correctement placer le curseur sur cette chimère que serait l’Âge d’Or du Rock’n'Roll. Apogée des ventes de disques, naissance du Mythe avec Robert Johnson pactisant avec le diable au carrefour le plus mystique du monde, époque des tournées “bigger than life”: pas facile de mettre le doigt sur cet âge rêvé.
Pour les deux new yorkais à l’origine de The Men, la réponse est claire. Il s’agit sans conteste du bon vieux temps où les folkeux originels (pour lesquels nous ne ménageons pas les encriers) de Woodie Guthrie à Leadbelly, Pete Seeger ou encore plus tard Bob Dylan, s’échangeaient, s’empruntaient, et se pompaient sans retenue des gimmicks de blues qu’ils ont rendus plus célèbres que leurs auteurs ne l’auraient jamais fait. Et pour cause, leurs classiques trouvent pour la plupart leur sources dans les champs de coton. Imaginez un peu Seeger revendiquer la paternité de Black Girl; c’est comme si Brassens s’était vanté d’avoir écrit La Digue du Cul ou Fanchon. Scandale, même si la comparaison est un peu boiteuse.
Pour faire court, pas d’auteurs, pas de royalties. Et ce fût comme ça pendant quelques dizaines d’années, jusqu’à ce que, pour prendre un exemple récent que Nick Chiericozzi et Mark Perro de The Men n’hésitent pas à nous conter en interview, Les Red Hot se fassent prendre la main dans le sac à piquer trois accords à Tom Petty. Jusqu’à ce que Lana Del Rey plagie une chanteuse grecque sur son Video Games. On pourrait aussi parler du sample dans le rap, mais on vous laisse plutôt continuer la liste.
Mais tout ça, The Men s’en tamponne cordialement. Leur idée est plutôt d’emprunter comme grand papa le faisait, à la régulière. “Je prends et j’utilise parce que ça fait partie de ma culture musicale”. Et c’est ainsi que le duo, devenu quatuor pour assurer de vrais concerts, sort en juillet dernier un premier album sur Sacred Bones, intitulé Leave Home, tout comme le classique de 77 des Ramones. Album sur lequel les fans de Spacemen3 reconnaîtront également le riff supersonique de Revolution dans le 5ième morceau du disque, (), et que nos confrères chroniqueurs américains se perdent à décrire comme un disque crossover entre Rock 70′s et krautrock, parsemmé de relents 90′s à la Dinosaur Jr.
En attendant la sortie le 6 mars prochain de leur second méfait, Open Your Heart, les deux copains s’en expliquent dans notre petit entretien. Derrière leur fascination pour ce qu’ils identifient comme étant un possible âge d’or, se cache la problématique de la propriété intellectuelle dans la musique. Sujet d’autant plus actuel que le disque ne vendant pas aussi bien que la dette grecque, pléthores sont les artistes prêts à s’étriper devant le juge pour récupérer des droits sur une chanson ou un plan prétendument écrit par eux. The Men, eux, répondent qu’ils recontextualisent, qu’ils tirent leur chapeau. Et bien entendu on les croit. La pratique est aussi vieille que le monde est monde et que l’art est art, alors WTF me direz-vous. Il nous a simplement semblé intéressant, au delà du fait rappelons-le que Leave Home donne sincèrement envie de remonter sur son Skateboard et de vider des 6-packs en allant à la plage, de se faire le relais d’une problématique qui semble guetter, aujourd’hui en période de vache maigre plus que jamais, nos amis compositeurs.
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