Préparez vos parkas, vos pullovers de grand-mère et vos chaussettes en laine triple épaisseur, car vous vous apprêtez à vous aventurer dans des kilomètres de poudreuse synth/cold-wave à température tellement froide qu'elle en devient à peine praticable (parce qu'elle se transforme presque en glace, si vous suivez la métaphore). Même pas répertoriée sur Discogs (ou à peine, par la seule grâce d'une apparition sur une compile Anywave), l'Américaine Heather H Celeste sortira donc la semaine prochaine un double album frigorifié de techno susurrée qui s'intitule fort justement Modern Death. De là à dire qu'on s'apprête à vivre un nouveau phénomène terrestre du type minimum de Maunder à l'écoute de l'album, il n'y a qu'un pas que nous ne franchirons pas, de peur de se faire jeter par une partie de la communauté scientifique (et Dieu sait qu'on y tient, au soutien de la communauté scientifique chez The Drone).
Les labels Anywave et Lentonia, qui co-supervisent la sortie du disque, n'ont semble-t-il pas peur de mettre les mains dans le cambouis, comme on dit. Avec sa longueur qui dépasse l'entendement et des morceaux qui excèdent très souvent la barre des dix minutes, ce disque aux fortes allures de pavé de la Pléiade n'a, à l'instar du dernier Miley Cyrus, pas envie de couper dans quoi que ce soit (que ce soit le cordon ou le bout de gras). Entre ambient délavé, cold wave des glaces et techno fantômatique, les tunnels de réverb' de Modern Death procurent la sensation de se trouver dans un rêve lucide sans fin. Déployant sa bizarrerie dans un étirement de sonorités industrielles et avec un beat souvent minimaliste, ces attributs ont la particularité d'accroître cette impression d'hypnose enveloppante. Et si on ajoute à ça un chant faux ET désincarné, on finit par se trouver en face d'un truc tellement malaisant qu'il provoque le rire nerveux, une sorte de train fantôme où l'on regarde sous notre siège voir s'il n'y a quand même pas un serial killer qui s'y cache. Quant au deuxième disque, s'il est plus lumineux que le premier, il y est toujours question de cette inquiétante étrangeté que l'on n'osera pas questionner de peur de ce qu'on pourrait y trouver. Parce qu'on n'en a peut-être pas l'air comme ça, mais on n'en a pas toujours fini avec notre Œdipe.
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