Il faut toujours réfléchir deux fois avant de beugler "kill all hippies!". Parce qu'il y a deux types de freaks, punk. Le premier, dont le textile préféré est le daim et la principale occupation est de se rouler dans le gazon à des concerts de simili Grateful Dead de pacotille (on vous laisse choisir le vôtre) en débitant des vers débilitants de Rimbaud ou Jim Morrison, mérite effectivement l'égorgement filmé à la webcam sans ménagement. Le deuxième genre, en revanche, est si extrêmiste dans son rapport au boucan, à l'intoxication et au ravissement cosmique qu'il est parfois capable de tenir tête au plus nihiliste des adeptes de sludge, de black metal ou de synth wave de corbeau.
Les heavy psych rockers très réputés de Destruction Unit (le regretté Jay Reatard y a débuté), dont le nom n'a pas été choisi en jetant des nickels sur une planche de oui-ja, font évidemment partie de cette race là, et leur nouveau Negative Feedback Resistor, dont le titre n'a pas été choisi en faisant défiler les pages d'un annuaire de l'Arizona, dépasse en intensité la plupart des sorties metal extrême de ces derniers mois. C'est bien simple, en comparaison, les disques les plus tumultueux de Comets on Fire ou A Place to Bury Strangers sonnent comme du pipi de chat. Avançant trois guitares et au moins trois fois plus de têtes d'ampli démesurées, la tête pleine de crust, de sludge et de cette americana morbide que Rob Zombie, Cormac McCarthy ou Tobe Hooper ont si bien racontée, ces garçons du désert restent psychédéliques au sens où ils veulent vous faire exploser les neurones, mais jouent une musique qui est tout sauf solaire et généreuse. Ou alors le Soleil qu'ils vénèrent serait un soleil noir, celui que vénéraient les Païens, Coil et les nazis, dont l'évocation contemporaine a moins à voir avec la lumière et la célébration de la vie qu'avec ce gouffre dans lesquel l'humanité est terrifiée de retomber.
Disque guerrier en bonne et dûe forme, livré d'un bloc et sans oasis pour se ressourcer, Negative Feedback Resistor est surtout étonnamment addictif, du genre qui instille le besoin irresistible de rappuyer sur "jouer" quand l'esprit s'extirpe de sa salve ininterrompue de colère et de saleté. Loin de nous l'idée de vous orienter vers quelque chemin de désespérance et de désolation, loin de nous l'envie d'applaudir l'avènement probable du Jugement Dernier, mais on n'a pas entendu de disque qualifié psyché plus fort, plus consistant et plus proprement psychédélique en cette rentrée.
Negative Feedback Resistor sera disponible en LP et CD ce vendredi sur Sacred Bones. A noter pour les radinous ou les impatients que l'album se télécharge gratuitement sur le site d'Adult Swim. A noter pour les autres que le groupe joue trois dans nos régions: le 19 Septembre à Angers, au festival Levitation, le 28 à Paris, à l'Espace B et le 29 à Lyon, au Sonic.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.