Mutation joue dans la pire des catégories musicales au monde: c'est un "supergroupe". Et si ces 50 dernières années nous ont appris quelque chose, c'est bien de se méfier de ces associations plus ou moins hasardeuses de gens plus ou moins connus et / ou doués dont la production fatalement tiédasse oscille entre le totalement anecdotique et l'infâmant terminal. Rappelez-vous l'effroi que vous avez ressenti en écoutant ces trucs: les Traveling Wilburys de George Harrison, Bob Dylan, Tom Petty, Jeff Lyne d'ELO et Roy Orbison; The Good, the Bad and the Queen, l'inexplicable joujou de Damon Albarn, Paul Simonon et Tony Allen; le Rockestra de Paul McCartney, David Gilmour, Tony Ashton, Pete Townshend, John Bonham et John Paul Jones (on tire un peu sur la corde pour celui-là parce qu'ils n'ont enregistré qu'un bidule ensemble sur un disque des Wings mais l'anecdote est toujours chouette à sortir en soirée). En fait le seul contre exemple probant auquel on pense, c'est This Mortal Coil - mais This Mortal Coil a créé sa propre lignée, celle de la fantaisie de studio qui utilise des icônes pop à contre-emploi, donc ça compte pas.
Entre en scène Mutation, bête à huit têtes imaginée par le leader des turbulents Wildhearts qui attache ensemble Shane Embury de Napalm Death, Jon Poole des vétérans punkeux-proggeux The Cardiacs, le dieu du harsh noise Merzbow, tout un pool de gens de groupes de Newcastle dont on n'a jamais entendu parler et, euh, cette vieille carne de Mark E. Smith - tout ça dans le seul but avoué d'être "extrême".
Et extrême, Error 500 l'est effectivement, mais sans doute pas dans le sens où on l'attend d'un disque qui sort sur Ipecac avec un membre de Napalm Death dessus. Certes, il y a du riff joué sur des guitares Jackson accordées en ré, du triton en veux-tu en voilà, des kilos de blasts grindcore; certes les structures façon live de maths éventré évoquent des dizaines de machins metalcore genre The Dillinger Escape Plan; certes les beuglements Mike Pattonnesques de Ginger Wildhearts ou Paul Astick des Hawk Eyes rattachent illico le skeud au petit monde guilleret du metal extrême.
Mais il y a surtout une quantité astronomique de bidules ici qui n'ont rien à voir avec quelque choucroute que ce soit et que les gars font valdinguer les uns dans les autres avec une absence de bon goût, de science et de bon sens qui confine à la folie. Assimilés dans le puzzle, on entend ici défiler les Beach Boys, Queen, l'XTC des premiers jours ou les moments les plus formidablement douteux de Frank Zappa (le dernier morceau fait un gros clin d'oeil à Bongo Fury, l'album live avec Captain Beefheart), à la vitesse de la lumière et sans la moindre queue de rat de nécessité formelle. Explication attendue: il n'y avait qu'un supergroupe pour pondre un truc comme ça. Alors vous allez nous demander: tous ces gens, tous ces trucs mis ensemble dans un plat à gratin, est-ce que ça fait un truc un peu bien? Est-ce que ça ressemble à Mister Bungle? Est-ce que ça sert à quelque chose? On en a aucune idée, mais on trouve ça très distrayant. Sortie ces jours sur Ipecac.
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