Jessy Lanza attendrit votre coeur sans jamais vraiment le réchauffer dans son nouvel album pour Hyperdub, Oh No

Jessy Lanza est arrivée il y a trois ans chez Hyperdub avec un premier album aux accents très R'n'B, Pull My Hair Back. Parfaitement produit, révélant une voix lascive, saisissante et haut perchée, ce premier jet dans la cour impitoyable de l'électro-pop confirmait une fois de plus le statut du label londonien de défricheur de talents féminins qui narguent les catégorisations et font figure d'exception dans leurs propres champs musicaux.

Oh No, son nouvel album enregistré entièrement dans sa ville natale d'Hamilton, dans l'Ontario, continue d'esquisser son portrait d'artiste audacieuse et ambigüe. La production, aussi impeccable, itérative, incisive que dans son premier opus, est orchestrée à quatre mains avec Jeremy Greenspan, son conjoint et moitié du duo Junior Boys.

Qu'est-ce qui rend l'album si réussi et si attachant ? Un poil passéiste mais toujours téméraire, Jessy Lanza parle une langue qui relie plusieurs mondes, ceux froids et anxieux des Grands Lacs de son pays d'origine, évoqués par un synthétiseur glacial et lointain, et d'autres plus chaleureux, aux rythmes acérés, agrémentés de samples façon juke ("It Means I Love You"). Résultat d'un travail minutieux qui fait en sorte de ne jamais étouffer la voix de moineau de Lanza, les arrangements de l'album lui permettent de se percher à des hauteurs observées chez de rares chanteuses, dont Miharu Koshi, collaboratrice des membres du Yellow Magic Orchestra.

Comme elle l'explique dans son communiqué de presse, Lanza s'avoue d'ailleurs fascinée par les techniques de production d'Haruomi Hosono dans les années 80, qui a produit les disques les plus réputés de Koshi. Oh No évoque ainsi autant le très réputé et recherché Parallelisme (1984) que les premiers albums des Junior Boys (So This Is Goodbye, Last Exit...), à la différence que Lanza se prête moins à des jeux de lyrisme qu'à des envolées véhémentes qui attendrissent le coeur sans jamais vraiment le rechauffer. Jessy Lanza, comme ses comparses affiliées à Hyperdub Laurel Halo ou Cooly G, trace un chemin inédit dans les sillons harassés de l'électro-pop, et c'est très rare en ce moment pour être signalé.

Oh No vient de sortir sur Hyperdub et avant de vous le procurer, voici plus bas quelques mises en bouche. Ne manquez pas Jessy Lanza en concert au Badaboum le 25 mai prochain avec Kero Kero Bonito, achetez vos places ici.