Chez les diggers et les aficionados de disco tardive, "Chief Inspector" est une sorte de graal incontournable: beat synthétique au cordeau, funk de 3 tonnes, petits oiseaux fusion qui tiennent en haleine tout le temps, c'est l'arme secrète qui passe bien dans tous les contextes (même la ligne 4 du métro parisien) et toutes les soirées, Quincy Jones et Michael sans la graisse, George Duke sans les refrains, le rêve mouillé de Metro Area. D'ailleurs, Larry Levan et François Kevorkian étaient fans.
Et pourtant. Quand Wally Badarou a enregistré Echoes, l'album semi-conceptuel dont "Chief Inspector" est tiré, il n'y croyait qu'à moitié. Pour citer la courte et assez passionnante autobiographie qu'il offre au badaud de passage sur son site officiel, "c'était supposé n'être qu'un receuil d'amuse-gueules, sorte de pré-échos d'albums à venir. Pour devenir finalement l'un de mes albums les plus importants, sinon le plus important pour beaucoup." D'où vient la méprise? Sans doute du triple statut problématique du claviériste franco-béninois: à la fois musicien de session super emblématique des années 80 (aux quatre coins de Paris puis aux mythiques studios Compass Point de Chris Blackwell), membre honoraire du M de Robin Scott et Level 42, producteur technophile et tête chercheuse méconnue du synthétiseur, ses albums solo ont longtemps repoussé les amateurs de new-age pour leur trop plein de funk et d'Afrique (Badarou est un Africain de coeur et un fanatique de Stevie Wonder assumé) et les fans de jazz-rock pour leurs triples couches de DX7, de Prophet 5 et de Synclavier.
Inspiré par les prods de Trevor Horn (notamment le Duck Rock de Malcolm McLaren), Badarou envisageait presque Echoes comme un disque de démo: des possibilités de la synthèse en plein essor et du MIDI naissant, de son travail de compositeur, du futur de la grande "sono mondiale" dont Echoes est l'un des premiers et très rares specimens probants (on rajoutera juste un Sakamoto, un Weather Report et un Eno dans le panier).
Totalement bordélique et fabuleusement aérien, c'est tout simplement le seul disque au monde qui peut enchaîner du highlife 100% synthétique, de l'electro funk et une ballade new age au piano sans ressembler pour autant à une croûte immonde. Miracle des miracles, Island réédite bientôt l'album entier en LP, en édition limitée et exclusivement via Piccadilly Records. Sur le site du disquaire, on peut lire: "Unbeatable tropical Balearica from Island Records 1980s Compass Point". On agrée à 100% et on vous conseille de vous y ruer pour le précommander.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.