Mercredi prochain, au Centquatre, à l'occasion des 120 ans de Gaumont et du centenaire du film, Arandel proposera un "cinémix" inédit pour accompagner la projection des deuxième et troisième épisodes restaurés des Vampires de Louis Feuillade, série de films légendaire menée par la proto femme fatale Musidora qui reste 100 ans après sa création l'une des oeuvres les plus singulières et les plus marquantes du cinéma muet français.

Arandel n'est pas le premier musicien électronique à s'attaquer à la série (on se souvient de la version composée par Gilb'r et I:Cube de Chateau Flight paru en disque il y a quelques années) mais il promet ici de s'en tenir dans sa sélection musicale à quelques chefs d'oeuvre de la musique électronique des années 50, 60 et 70, histoire d'imaginer "à quoi auraient ressemblé les films muets du début du siècle s'ils avaient pu être mis en musique par les expérimentations sonores des pionniers de l'électronique". Le dispositif intègrera en outre du bruitage en direct, ce qui promet quelque chose d'assez dérouant: une ellipse de quatre décennies entre deux moments essentiels de l'avant-garde au 20ème siècle. Intrigués par ce programme qui envisage de mettre à profit "le pouvoir évocateur très fort des pièces de recherche de Vladimir Ussachevsky ou des pastilles sonores de Delia Derbyshire et de ses compères du BBC Workshop", nous avons proposé à l'artiste de nous présenter 5 des grandes oeuvres early electronics qu'il a prévu d'intégrer à son accompagnement.

Mort Garson : Bamboo City (1970)

Un compositeur américain de pop électronique relativement méconnu. Et c’est dommage. Depuis son album de musique pour les plantes (Plantasia, 1976) à sa collection de disques sur les signes du zodiaque (1969) en passant par sa relecture du Magicien d’Oz (The Wozard Of Iz, 1968), tous ses albums recèlent des perles qui balayent tout le spectre des musiques électroniques, comme le très beau “Didn’t You Hear” sur la BO du même nom sortie en 1970.

Bruno Spoerri : The Race (1978)

Spoerri est un expérimentateur génial et Suisse, qui a pas mal fricoté avec le jazz, et dont l’oeuvre électronique, expérimentale et souvent passionnante a été copieusement rééditée chez Finders Keepers. “The Race” est tiré d’un show télé pour la Télé Suisse Romande, commandé en 1978 mais finalement resté dans des tiroirs jusqu’a sa récente redécouverte par Andy Votel. Une sorte d’électro-funk façon Bullit à la sauce helvète.




Dave Vorhaus : Sea Of Tranquility B (1980)

Légende du BBC Workshop avec Delia Derbyshire et principal artisan derrière le culte" An Electric Storm de White Noise, Dave Vorhaus a aussi réalisé quelques albums de library music dont un duquel est issu ce morceau plein de mystérieux suspens très cinématique, qui fait office de thème des Vampires en fil rouge pendant tout le cinémix. 

Otto Luening : Fantasy In Space (1955)

Plus “tape music” que musique électronique, cette pièce de Luening est assez typique des nouvelles approches expérimentales développées dans les années 50 et 60, en parallèle des découvertes des premiers synthétiseurs. Des instruments “acoustiques” et des enregistrements sur bandes qui sont ensuite manipulés, découpés et recollés à la main. La bande-son parfaite pour les voyages dans l’espace à la Ed Wood.

Ruth White : Snow Is Dancing (1971)

Extrait d’un album de 1971 la lignée de ce qu’a pu faire Wendy Carlos avec sa musique classique réorchestrée pour synthétiseurs Moog, “Snow Is Dancing” est une magnifique relecture du classique de Debussy. Le traitement électronique parait complètement naturel, très fin, et beaucoup moins pompier que la plupart des pièces de Switched on Bach de Wendy Carlos par exemple.