Quand Dominique Dépret n'accompagne pas Arlt ou Armelle Pioline d'Holden à la guitare, il compose en tant que Mocke. Après L'anguille, son premier album solo instrumental paru chez Objet Disque sous ce pseudonyme, Dépret en revient à son jazz à écouter dans la chambre par temps de pluie, comme aujourd'hui.
St-Homard, ce nouvel album est, si ce n'est meilleur que son premier, tout aussi roboratif de délicatesse et de malice. En dix pistes qu'on croirait sorties d'un gramophone comme d'un panier de pique-nique, le guitariste enfile les perles de son jazz à bout d'aiguille avec un réalisme propre aux scènes de genre dont parle Zweig. "Trois regards sur le malandrin" dessine entre les corbeilles à fruits d'une galerie commerçante le chemin scabreux d'un forban, "Cormoran se déploie dans le ciel gris" vous promène au milieu d'un paysage plein de larmes dans une nuit pleine.
La dextérité de Dépret n'est pas seulement dans son doigté, mais surtout dans sa propension à révéler derrière chaque note les images d'un nouveau tableau, comme on tire le rideau le matin pour voir le temps qu'il fait. Loin d'être un laïus auquel on se contente de tendre l'oreille lorsque la page se tourne, "St-Homard" fait le récit fringuant d'un roman potelé, peuple l'esprit de couleurs fraîches et réconfortantes.
"Les vieux s'en vont", esquisse les chuchotements réchappés des commissures d'une porte voisine au bout du couloir, "Ay, Perdon, Perdon" suit la marche citadine d'un docteur en quête de patients dans un Portland désaffecté. St-Homard parle de la vie ordinaire, fait parler ses protagonistes sans qu'ils n'ouvrent jamais la bouche. Il ne leur laisse qu'une chose : un petit bout de rêve entre les cordes d'une guitare.
St-Homard sort vendredi sur Objet Disque et s'écoute en entier ci-dessous. Mocke jouera à Paris, à la Petite Halle de la Villette, le 24 juin.
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