On en parlait il y a deux jours : pour leur première sortie sous le drapeau Columbia, PC Music et Danny L Harle ont fait appel aux talentueux clippeurs AB/CD/CD, connus pour leur travail avec Lily Allen, Factory Floor ou Panda Bear. Les Français y reprennent les concepts fumeux et fascinant qui font l'identité du label tout en livrant une interprétation personnelle de son univers esthétique clinquant et pervers désormais bien identifié. En lieu et place de nos sempiternels paragraphes théoriques sur l'avenir de la pop de demain, on a demandé à Clément Dozier et Camille Dauteuille d'AB/CD/CD comment ils ont travaillé avec les hurluberlus bariolés, comment s'était passée la collaboration avec Danny L Harle et pourquoi, comme nous, ils sont avant tout des fans de PC Music.
Danny L Harle - Broken Flowers
03:23
Comment vous avez rencontré Danny L Harle ?
C’est PC Music qui nous a contactés. On a rencontré Danny après coup, après leur avoir pitché une idée. On en a ensuite discuté avec Danny, avec Finn Diesel (le D.A. du label) et Laura la commissionner.
Qui a eu l'idée du synopsis ?
Ils avaient un brief bien réfléchi, en tout cas plus développé que ce que l'on reçoit d’habitude. Ils avaient beaucoup de cases à cocher mais ça a été finalement assez naturel pour nous de trouver une idée qui remplisse leurs critères. Parce que ça correspondait à ce qu’on fait en général. Je ne sais plus exactement ce qu’ils demandaient, mais je me souviens de l'idée principale qui était de respecter le ton du morceau. Et c’est justement ça qui nous avait accroché la première fois qu’on l'a entendu. Il y a une espèce de joie triste dans ce morceau… Ils parlaient de dualité, de mélancolie euphorique, c’est génial comme brief… d’où l’idée du personnage anémique, effectivement !
Aviez-vous des références picturales, artistiques ou cinématographiques précises en tête ?
Oui. Enfin, elles sont venues dans un second temps et ensuite elles ont un peu disparu quand le projet a pris sa propre forme. On se réfère souvent à un artiste en particulier quand on travaille sur un sujet mais cette fois, pas vraiment. Le truc qui était le plus prégnant en terme de référence c’était l’esthétique générale du label et on a tourné un peu autour de ce que fait l’artiste Kate Cooper (NDR:
Kate Cooper est une plasticienne britannique qui travaille notamment sur la position que le corps de la femme a occupé dans l'histoire de la technologie de l'image numérique).
Vous connaissiez PC Music avant de rencontrer Danny L Harle ?
Oui. En fait on connaît le morceau depuis un petit moment, il est sorti l’année dernière et il nous était bien resté dans la tête… sans jamais penser qu’ils auraient un budget pour faire un clip ni qu’ils penseraient à nous pour le faire !
Comment vous commencez une collaboration avec des musiciens ?
Ça nous est arrivé une fois de contacter un artiste parce qu’on était fan et qu’on avait une idée à leur proposer, c’était Factory Floor. Sinon soit c’est un pote, soit (et c’est le plus souvent comme ça) le label contacte notre boîte de production en connaissant le plus souvent notre travail. Ils envoient un morceau et nous demandent de proposer une idée. Parfois ils ont un brief, parfois pas. Ils demandent souvent aussi à d’autres réalisateurs de proposer des idées et ils partent sur celle qu’ils préfèrent. Parfois ils jettent tout, ça arrive… Et ensuite on discute avec l’artiste. Certains sont très impliqués comme Noah (Panda Bear) ou FFS (et c’est hyper enrichissant - Sparks ont une idée très précise et juste de leur image) et d’autres pas du tout mais on a généralement de la chance, les gens nous font confiance.
Est-ce que vous connaissiez l'univers visuel du label ?
Oui, ça nous parle et nous inspire beaucoup. Même si on fait autre chose… C’est très excitant ce qu’ils proposent. On aime beaucoup DIS magazine aussi par exemple.
Qu'est-ce que vous pensez des autres clips de PC Music (celui de Hi d'Hannah Diamond en particulier) ?
Hannah aurait pu être plus jolie dans « Hi ». Pour être honnête, je ne trouve pas que ça rende tout a fait justice à l'esthétique de PC Music. Mais l’intention est bonne je trouve. Ce n'est pas un exercice facile. Ce qui marche en image fixe ne marche pas du tout de la même manière en vidéo.
Le clip de "Broken Flowers" semble trancher avec l'univers esthétique du label, était-ce volontaire ?
Oui, respecter leur « charte visuelle » n’était pas du tout quelque chose qu’ils cherchaient. Mais on trouvait ça risqué, on ne voulait vraiment pas faire du sous PC music… Ils voulait qu’on reste fidèle à notre esthétique… Du coup, même si on s’est orienté un peu dans leur direction, on a surtout fait ce qui nous semblait le plus juste par rapport à l’idée de la vidéo. Je pense que c’était assez intelligent de leur part. Et d’ailleurs, je crois que vous avez très bien titré votre article en parlant de MTV ! Mais on avait quand même l’impression qu’on était dans une interprétation vidéo assez directe de leur univers… Plus sur le ton que sur l’esthétique par contre, c’est vrai. Un truc premier degré romantique, sans cynisme ou le 1/2 degré de plus qui te détache… Et c’est là-dessus qu’ils nous ont poussés plutôt que sur leur esthétique visuelle.
Pour autant, on y retrouve plusieurs thématiques très caractéristiques du label, comme si vous en proposiez une représentation alternative. Comment vous avez fait ces choix ?
On essaye toujours de se rapprocher de l’artiste dans ce qu’on montre et raconte. Après il faut que ça colle avec ce qu’on est, et ce qu’on aime faire pour que ça fonctionne bien sinon « c’est du chiqué ». On s’est très bien entendus sur les goûts et la sensibilité avec Finn Diesel et Danny L Harle… Ils ont été hypers d’accord avec la manière dont on « parlait d’eux » dans ce clip. Au final j’ai tendance à croire qu’ils sont venu nous voir en ayant une idée assez claire du genre de choses qu’on allait trouver pour eux. Ils donnent un peu cette impression, en toute humilité, c’est fort !
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