Quand on vous affirmait il y a quelques mois que Dorian Pimpernel avait su, avec brio, remettre en état de marche le manège enchanté que Syd Barrett avait rendu tout pété à Henri-Georges Clouzot, ce n'était pas de la poudre aux yeux.  La preuve en images avec ce nouveau clip fantastique pour l'un des titres les plus proches de l'attraction lunaire extrait d'Allombon : "Alfalfa". Dans un petit théâtre des matières, la bande des Pimpernel déploie en toute décontraction son arsenal de flashs colorés et de gestes choréo-rythmiques sous les machines à fumées et les images-écrans, devant un parterre d'invités super smart aussi placides et imperturbables que des usagers de la RATP un lundi matin.

Mais une fois n'est pas coutume, les projecteurs doivent se tourner sur les deux magiciens de l'ombre qui ont réalisé ce clip : Laurent Talon (également le bassiste assis du groupe) et Lucie Jégo, dite "les doigts de fées". Déjà fort d'une poignée de vidéos pour Athanase Granson, Mehdi Zannad, Shit Browne et bien sûr Dorian Pimpernel par deux fois auparavant (pour "Existential Suits" et "The Mimeograph"), le binôme fait partie des rares faiseurs d'images pour la musique à remplir avec un savant mélange d'inventivité expérimentale et de technicité le cahier des charges du réalisateur de clip honnête : être narratif, et faire dans l'utilitaire et le kaléidoscopique.

Le tandem emprunte ici allègrement à tout un pan de l'esthétique franco-française de la période des Trente Glorieuses (et un peu après), allant de l'Op Art de Vasarely à l'architecture brutaliste, en passant par le cinéma expérimental-fantastique de Philippe Garrel et de Jess Franco, nous fait dire que nous tenons là très sûrement nos Julian House hexagonaux (mais si, le graphiste alchimiste derrière l'esthtétique du label Ghost Box?). Il n'y a plus qu'à leur souhaiter d'être appelé à sé(r)vir encore et encore, avec ce même sens froid du carrousel mémoriel et prospectif.