Si vous ne connaissez toujours pas Peter Gordon (alors qu'on vous en a déjà parlé), sachez que Pitchfork vient tout juste de lui consacrer quelques lignes pour la réédition de l'une de ses collaborations avec Dinosaur L (aka Arthur Russell). Si ça vous plaît et que vous êtes désireux de poursuivre cette entrée en matière d'un artiste touche-à-tout et prolifique depuis les années 80, jetez une oreille sur la compilation Peter Gordon & Love Of Life Orchestra sortie chez DFA en 2010 (James Murphy est un fan de la première heure) qui regroupe ses meilleures compositions disco punk jouées par les pontes de la scène downtown de cet âge d'or du funk popeux blanc un peu world un peu beaux-arts (j'ai nommé David Byrne, A. Russell, Ned Sublette).
En revanche, pour écouter Symphony 5, nouvel album du saxophoniste commandé par l'excellent Foom Music (à qui l'on doit la sortie du dernier Bruno Pronsato) et qui ressemble fort à un comeback, il va vous falloir vos deux oreilles.
Cet album forcément conceptuel et organisé en suite nécessite en effet la plus grande attention, sans quoi vous manqueriez de passer à côté et risqueriez de trouver que ça ressemble au jazz qui passe sur FIP à l'heure de Jazzafip, ou pire, aux morceaux de démonstration "jazzy" de vos vieux synthétiseurs Casio. Ca serait regrettable, car derrière ces roulements de caisses claires un peu fanfare et ces xylophones un peu Cal Tjader se cache un univers musical immense, qui emprunte à la fois aux harmonies slaves, aux rythmes traditionnels d'Afrique et d'Amérique latine, et à la force d'improvisation du jazz fusion. Et c'est de cet équilibre que jaillit la beauté du disque. Car contrairement à 90% des jazzmen et autres compositeurs de musique nouvelle de sa génération, Peter Gordon est un expert du dosage, qui parvient habilement à maîtriser cette mixture d'influences en évitant toutes les vulgarités qu'elle pourrait engendrer. Les harmonies jouées par les cuivres sont toujours délicates, les parties improvisées sont tout en retenue, sans aucune échappée nombriliste, et les compositions alternent intelligement phases orchestrales de big band "classiques" et moments accalmiques réservés aux mélodies. Pour faire court : le jazz de Peter Gordon, tout en subtilités, est moins bête qu'il en a l'air.
Vous pouvez précommander l'album sur le site du label, et écouter avant tout le monde le très beau titre "Homeland Security".
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