Steven Warwick est un type intrigant. Lorsqu'on l'interviewait l'année dernière, le musicien anglais basé à Berlin (et plus connu sous le nom de Heatsick par les amateurs de house bricolée cradingue) se désolait du tour conservateur que prenait selon lui une partie de la musique électronique contemporaine (en professionnalisant l'acte créatif et en fétichisant son matériel, notamment) et se disait du même coup bien content de faire chier les geeks audiophiles avec son Casio tout pourri. Si on voulait se montrer un peu expéditif (eh, on n'est pas journalistes pour rien, hein), on pourrait donc dire que Warwick représente le versant "punk" actuel de la musique électronique.
Mais Steven Warwick est aussi artiste, et plus précisément plasticien. Et, pour le pire et le meilleur, disons qu'il fait un peu de la musique "d'artiste". Ce qui n'est pas un souci en soi, bien sûr, mais ce qui rend sa musique perméable aux concepts plus ou moins fumeux et à l'emballage d'avant-garde. En témoigne son nouvel album Nadir, pour lequel il abandonne son pseudonyme et qu'il choisit de signer de son nom de naissance. Sorti chez l'écurie allemande noir-Soulage PAN, masterisé par l'ingénieur théorique Rashad Becker et artworké par le boss du label Bill Kouligas, Nadir se présente comme une mixtape audiovisuelle écrite et enregistrée entre Berlin et Los Angeles, une série de 11 tableaux répétitifs et inachevés (une vraie tendance dans la house analo et smart, voir Beau Wanzer) accompagnés par des vidéos de 10 à 30 secondes (toutes visibles sur son compte Youtube, on vous en met une seule ci-dessous parce que faut pas non plus déconner) qui documentent "une réinitialisation créative et émotionnelle" pour Warwick, ainsi que "le temps passé par le musicien dans des environnements urbains et ruraux".
On est loin du jet de pierre régressif et nihiliste lancé au sérieux papal et à la face de la tradition donc, et plus proche du clin d'œil malicieux adressé à ses pairs musiciens/artistes qui ne manqueront pas de se gausser avec Warwick de ses propres facéties. Un geste d'entre-soi en somme, qui rappelle un peu les pitreries de la paire Inga Copeland/Dean Blunt, autres faux idiots et vrais punks de centres d'art. D'ailleurs, je serais prêt à parier que c'est la voix de la moitié masculine d'Hype Williams qu'on entend sur une grosse partie du nouvel album de Steven Warwick.
Le nouvel album de Steven Warwick Nadir est sorti le 18 novembre chez PAN. Il s'écoute ci-dessous, se commande ici :
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