Les noiseux sont des fines gueules. Les bouffeurs de pop symphonique ou de techno aristocrate ont bien sûr tendance à les mater de haut et à croire qu'ils pondent leur boucan comme on se déleste du burger de la veille, le t-shirt imbibé de sueur de la veille et une canette de Bud' tiède calée au fond poing. Mais pour en avoir fréquenté quelques-uns dans la vraie vie, je peux vous dire que c'est un cliché total. Les mecs répètent leurs plans à 120 décibels mais leur seul modèle esthétique, c'est la dentelle.
La preuve par le processus: le nouveau Lightning Bolt n'est pas nouveau, il a été enregistré en 2008 et les gars le gardaient patiemment sous le coude comme un trésor. A la première écoute du premier morceau, on croirait presque qu'il a été enregistré un soir de grande colère, le lendemain de la réélection de W. Mais non, les dates collent pas. Ce déchaînement d'esprits malins, de hullulements caverneux et de percussions de l'Armée de Sauron n'est pas du boucan, il le mime, il le représente. Chacune des particules de fuzz qui s'entend sur la bande a été aposé là comme un coup de pinceau sur un tableau de Turner. La dévotion de Lightning Bolt pour Crepitus, Dieu du Bruit est équivalent à celui qui liait Malévitch au grand Vide.
Pas la peine de vous couvrir les tympans, donc. On compte même sur vous pour écouter Oblivion Hunter avec toute l'attention et la cérémonie qu'il mérite, pourquoi pas en feuilletant les 800 pages d'If-n-Oof, le dernier pavé incroyable de Brian Chippendale. Vous verrez, ça glisse comme de la poésie.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.