Comme le savent tous les gens bien qui parlent Allemand et / ou qui ont vu le film et la mini-série du même nom, "Heimat" signifie à la fois "maison", "village natal" et "patrie". Comme on le sait aussi depuis qu'on a demandé à un collègue germaphonone de nous dire de quoi causaient leurs chansons (on a des origines, mais on entrave pas plus de dix mots de la langue d'Arno Schmidt), il n'est pas impossible que ni Olivier (membre éminent de Cheveu et Accident du Travail) ni Armelle (membre éminente de Badaboum et The Dreams) n'en aient la moindre idée. Ça sautera en effet aux oreilles de n'importe quel kerl qui a étudié la langue allemande plus de 33 minutes : les chansons des deux Musikers qui font Heimat sont chantées en yaourt teutonophone.
Si Heimat s'appellent Heimat, alors, c'est peut être pour nous dire que leur musique n'appartient à aucun terroir, aucune tradition, et qu'elle est le contraire diamétral de celle jouée par cette fanfare bavaroise dont vous avez surpris un jour une performance par mégarde dans un village du Salzkammergut en frémissant à l'idée qu'elle puisse ressembler au genre de musique qu'appréciait ce bon vieil Adolf pour se détendre à la maison quand il n'allait pas à l'Opéra voir une représentation de La Walkyrie.
De fait, la seule tradition qu'on reconnaît dans la pop électronique d'Heimat gît dans les samples martyrisés par le duo dans le sampleur, et elle a tout l'air de venir d'Orient ou d'Extrême-Orient. Musique de cour japonaise, musique d'opéra chinois, gamelans indonésiens: on a aucune idée du pourquoi ou du comment ces musiques se sont retrouvées dans ces chansons mais on devine que poser la question reviendrait à demander à un bluesman pourquoi il a choisi le pentatonique. Tout ce qui compte, c'est que ça ressemble à quelque chose - un idiome ? - et que ce quelque chose nous donne envie de faire des choses étranges quand on se prend en pleine poire "Afrikistan" ou "Pompeii" dans l'inconfort d'une salle de concert ou le confort du salon, comme se couper un doigt ou jeter son propre corps contre d'autres corps.
C'est la deuxième chose qui saute aux oreilles, la musique d'Heimat est très cohérente mais elle ne ressemble à rien. Elle est rock, pop, punk, post, expérimentale, majestueuse, bricolée, généreuse, hardcore. Elle est démente et très censée. Virtuose et manchotte. Française et internationale. Un peu allemande tout de même, parce qu'Armelle chante un peu comme Nico ou Bettina Köster de Malaria! Elle est surtout très libre, et on utilise pas le mot à la légère. Ecouter en entier Heimat, le premier album d'Heimat, balade la tête dans trois décennies, mille sous-scènes rock, une bonne quarantaine de pays. Dans la musique d'Olivier et Armelle, à part un Allemand inventé, on n'entend beaucoup d'unheimlich - un des antonymes possibles d'"heimat", soit dit en passant - et quelque chose comme le futur du rock de France. Ni plus, ni moins.
Heimat arrive en shop incessamment sous peu, on vous propose d'en écouter un extrait ci-dessous en attendant le jour J.
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