Il existe à Hamburg un petit kiosque hémisphérique, pourvu de deux entrées antipodiques. La première offre jusque tard dans la nuit à l'allemand bonhomme un accès réconfortant à la renommée currywurst accompagnée de la bière qui se doit. La seconde le conduit quant à elle, et c'est bien commode, à une salvatrice pissotière: soit deux entrées pour deux fonctions - absorption / élimination - augurant un vertigineux mouvement potentiellement perpétuel. Tout ceci ne serait qu'anecdote si, dans ce décor qu'il commente avec à-propos par une nuit glaciale, Félix Kubin ne venait par sa présence de nous ouvrir la porte de quelque surréalité germanique. Quelque part dans Hamburg, l'homme le plus élégant de l'ère atomique sourit à ce cauchemar circulaire égayé de néons fantaisie.
On a parfois senti le brillant musicien/performer/compositeur allemand un peu inquiet à l'idée que les Français le prennent encore pour un simple showman pop... C'est qu'il a beaucoup fait pour cela, concédant jusqu'à la dance musik au détour d'un EP légendaire, ou atomisant systématiquement les salles à grands renforts de MS20, d'éclairs en carton, de costumes sur mesures et de punchlines incitant Thomas Mann à sortir de ses rêves.
Si cela fait un moment que l'on suit comme on peut ses diverses créations théâtrales et radiophoniques (notamment via l'excellent disque sorti chez Dekorder), l'arrivée de cette "meta fiction radiophonique" autour d'un Orphée Mécanique (intégralement en Allemand dans le texte, ça mérite d'être précisé) nous donne à entendre, toujours plus et toujours mieux, l'étendue de sa grammaire analogique. Car le Kubin est une langue vivante. De ses chansons les plus classiques à ses albums les plus bruitistes, sa patte unique est toujours là, obsessive à souhait: désaccords synthétiques, accidents électriques, scansions textuelles et sens du décalage... Loin de se répéter, il ne fait que mûrir, fort d'une trajectoire qui témoigne encore d'une certaine conception profonde du métier de musicien. Loin, très loin des feux de paille Pitchfork, autant que des solipsismes en circuit fermé. Ci-dessous, on vous copie-colle les crédits et l'argumentaire en Anglais, histoire de voir en détails de quoi il en retourne avant d'appuyer sur "play".
Felix Kubin created his new version of the ancient myth as an acoustic comic, in which the songs of Orpheus become audible memories, that extend the notion of song beyond its traditional borders into the fragmentary and experimental.
“The piece is an ejector seat that throws the listener out of the linearity of the story, something like a meta radio drama, a parable, a poetic dissolution, using motifs of the original story, but more open and experimental. It is Orpheus’ musique mécanique“.
With: Lars Rudolph, Gerhard Garbers, Yvon Jansen, Charlotte Chrome, Traugott Buhre, Marlen Diekhoff, Leéna Fahje, Nikola Duric.Production: BR Hörspiel und Medienkunst/Radio Drama and Media Art 2006/2012 Dramaturgy: Katarina Agathos.
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