Geoffroy Laporte fait de la musique sérieuse, très sérieuse, trop sérieuse sans doute pour la France de 2014. Pourtant passé par une tripotée de formations aux blazes tous certifiés "LOL" par un de ces groupes Facebook dont font partie vos collègues du club de ping-pong (Louise Mitchels, Besoin Dead, Missfist, Mobylette Facile) et échappé d'un milieu plutôt porté grimaces et bastons molles qu'explosion de larmes en plein riff (celui du garage hargneux de France), son Jessica93 de one-man band resiste pourtant à toutes les prises de distance, toutes les tentatives d'ironie.
Son nouveau Rise particulièrement n'est fait pour faire rire personne. Compact comme une brique d'acier pur, il s'en tient à son avatar très personnel, très intense et très classique de new-wave très lourde et triste comme la pluie, inspirée comme les groupes de rock d'autrefois par des choses connues de nous tous - c'est-à-dire la new-wave gros son façon Disintegration de The Cure, avec snares synthétiques qui claquent, ostinato de basse au médiator et rab de feedbacks dans les airs et pas "ce mini-cd de Coil édité par une galerie ukrainienne en 1996 qui est l'alpha et l'omega de la radicalité" ou Egberto Gismonti.
Au risque sans doute à se faire railler par les ayatollahs qui traînent: dans une interview de Geoffroy parue hier soir sur Gonzaï, on apprend que "les trois quarts du temps, quand on (lui) propose une première partie, c’est un vieux groupe" et à l'écoute du "Karmic Debt" ci-dessous, on peut difficilement en vouloir aux programmateurs de salles de concert. Le fait est que les groupes du genre de Jessica93, simple, massif et deadly sérieux ne se bousculent pas au portillon. Surtout, on peut difficilement en vouloir à Jessica93, qui fait le job comme plus personne n'ose vraiment le faire. Ceci explique sans doute la notoriété quasi irréelle de son projet en France, en 2014, survenue pendant que les grosses institutions du rock, celles qui organisent des tremplins et des concours sur Internet, avaient le dos tourné. Pendant qu'on vous pond des blagues et des théories fumeuses sur le contemporain, les fans de plus en plus nombreux de Jessica93 n'attendent rien d'autre que de se perdre de nouveau dans les montagnes de reverb' de ses chansons pour oublier tout le reste.
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