On vous refait pas l'histoire mais on va tâcher de vous ébaucher le contexte.

Nous sommes en 1991, et la musique électronique anglaise est à un carrefour. La jungle, le happy hardcore et l'IDM n'existent pas encore - ou  plutôt, personne n'a encore pensé à leur donner des noms. Quelque part près de Manchester, dans la riante commune de Rochdale, deux gamins fans de culture hip-hop classique, de Coil et de techno s'adonnent depuis quelques années à des expérimentations étranges, à base de concassages divers et de supplices infligés aux séquenceurs et boîtes à rythmes entassés sur leur table de travail. Ils n'ont pas encore sorti - ou s'apprêtent à sortir leurs premiers maxis: un Cavity Job sous-influences (Orbital, UR, Mantronix) sous le nom très étrange d'Autechre pour le label de hardcore Hardcore, et un Lego Feet totalement visionnaire sur Skam, petite structure que vient de monter leur pote Andy Maddocks.

Un soir, ils jouent au Bojangles, une petite boîte de Rochdale. La rave culture est à son comble, et leurs breakbeats en avalanches et leurs stabs de Juno en dents de scie semblent couler de source pour tout le monde. Il ne fait aucun doute que la musique virile et tourbillonnante qui sort des enceintes du club est de la pure dance music de son temps, à peine dérivée de la rave, à des miles et des miles des purées de fractales qui feront faire la réputation du duo dès sa signature sur Warp deux ans plus tard. Quelque part dans la foule, un anonyme avec un camescope filme sans le savoir pour la postérité.

C'est Robin Rimbaud, pionnier de l'ambient sous le nom de Scanner, qui a signalé via son compte twitter l'existence de ce document incroyable, uploadé il y a 4 jours via un compte pour l'instant anonyme (peut-être le sien). Outre la musique qu'on entend dans le brouhaha, tout est précieux pour l'histoire - les fringues, les donzelles, les pas de danse et les hurlements en manchesterien dans le texte. On s'en délecte non-stop depuis ce matin 10h02.