Il est assez appétissant de lire les articles concernant Eric Chenaux dans les profondeurs d'Internet. De "défenseur de ballades avant-gardistes" à "descendant médiévalisant d'Arthur Russell" en passant par "troubadour post-moderne", il y a de quoi sérieusement saliver. Il semble bien que l'on veuille nous faire croire que le folk, comprendre quelque chose qui n'a rien à voir avec la grande folk music anglo-saxonne et qui se résume souvent à de la performance de chansons maisons dans leur plus simple appareil - guitare/voix -, n'est pas mort. Alors pour une fois, une fois seulement, on consent à mettre notre défaitisme dégoulinant d'amertume de côté, et on se laisse aller à l'innocence de ces auditeurs profanes qui se plaisent à idôlatrer chaque nouvel artiste folkeux (ou folk-creux) signé chez 4AD et consorts.

Idiots que nous sommes, non seulement le folk est bel et bien en vie, innovant, et parfois même "avant-gardiste" (on pique l'expression au communiqué de presse qui accompagne le disque dont on vous parle aujourd'hui). Attention, on ne fait pas allusion à cette avant-garde fourre-tout qui sert à désigner les expérimentations ésotériques de quelques gardiens d'une musique vérrouillée dans son sérieux. Non, veuillez m'excuser si ce que je m'apprête à dire ressemble fort aux analyses vaseuses d'André Manoukian, mais la musique d'Eric Chenaux est effectivement, entièrement authentique, et je crois bien que c'est précisément ce qui fait son avant-gardisme (ou au moins ce qui la rend si singulière en ces temps où il est d'usage de vénérer de la pop-plastique-préfabriquée ou une pop-folk dont la seule "authenticité" est un argument marketing). Prônant un retour à la Nature, Eric Chenaux fait de la folk music écologique et Skullsplitter, qui sort sur le toujours très politisé Constellation, en est le manifeste. Pour preuve le vidéoclip très Pierre Rabhi de "My Romance", tout en prairies et en chevaux, que nous avons la chance de vous présenter en avant-première.