C'est un peu toujours la même histoire avec les groupes garage (bien que les Philadelphiens de Sheer Mag n'appartiennent pas complètement à cette catégorie, d'accord, mais j'essaye de tenir un argument là) : les premiers albums sonnent patate, l'énergie (essentielle à cette musique) fait le gros du travail, l'effet communicatif des riffs et des refrains immédiatement identifiables s'occupent du reste.
Puis, inexorablement, tout cela s'estompe : les tournées qu'on fait parce qu'il faut en faire, les disques qu'on sort parce qu'il faut en sortir (et non plus parce que ça résulte d'un besoin vital comme aux débuts) ôtent cette vigueur pourtant primordiale - un comble lorsque la qualité première de cette musique est d'être fun, régressive, instantanée, de ne s'embarraser ni de technique ou de complications.
C'est à peu près pour ces raisons qu'il faut absolument se précipiter sur la musique de Sheer Mag dès maintenant (sans vouloir vous commander, hein), car elle est pour l'instant tellement irrésistible et viscérale (même pour de la feel good music) qu'on se dit qu'elle ne pourra pas l'être autant beaucoup plus longtemps. Peut-être est-ce parce qu'elle est d'office à la fois bienveillante et hargneuse, qu'elle se présente à nous sans filtre ni écran de fumée, qu'elle échappe à une catégorisation précise, n'a pas peur de convoquer le rhythm'n'blues juvénile des Jackson 5, le hard rock langoureux de Thin Lizzy et une science power pop toute 80's (soit des références totalement rincées pour la plupart des groupes avides de coolitude aujourd'hui), qu'on se dit dès les premiers instants où l'on entend sa musique que le groupe ne triche pas.
Prenons la voix de la chanteuse Tina Hallaway, petite teigne de féminisme colérique et joyeux : un peu fausse, un peu perçante, mais tellement réjouissante dans la foi qu'elle dégage et qu'elle fait sienne. Et si on a si envie de l'écouter chanter (et de manière plus large, d'écouter la musique de Sheer Mag), ce n'est pas que ses vocalises soient particulièrement prodigieuses, mais parce qu'elle a l'air tellement convaincue par ce qu'elle avance qu'elle fait automatiquement figure d'autorité. Et mine de rien, ça ne court pas les rues tant que ça de nos jours.
Alors, en attendant le crise d'inspiration, la lassitude du boulot et l'impression de se retrouver face à un groupe qui n'est là que pour payer ses factures, précipitez-vous dessus. Ça tombe bien, le groupe vient de sortir une compilation de ses premiers maxis, en attendant un premier album qui sortira en mars (et dont on espère qu'il sera au moins aussi fort). Vous pouvez vous procurer la compilation sur Bandcamp par ici, et on vous a mis quelques titres ci-dessous :
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.