Honnêtement, qui n'a jamais entendu le nom de Positive Education ? Ces dernières années, le collectif de producteurs et DJ a mis son nez dans bon nombre des choses excitantes engendrées par la dance music, et a organisé des évènements un peu partout en France depuis sa création à Saint-Étienne. Profondément ancré dans la ville, le collectif y organisait du 9 au 12 novembre la deuxième édition (troisième en fait, après une édition brouillon) de leur festival, le Positive Education Festival- ou PEF de son petit nom. 

Considéré comme le centre de leurs activités par l'équipe fondatrice - qui prépare autrement une édition parisienne pour l'été -, le festival prenait ses quartiers cette année dans un seul lieu, là où l'édition précédente prenait la forme d'une visite touristique de la ville, de ses cinémas à ses squats, en passant par l'immanquable Palais des Sports. Là où le festival perd en originalité et en ancrage locale, il gagne en force et en simplicité: un lieu, celui de la cité du Design – ou un complexe de hangars, pour une ambiance on ne peut plus authentiquement Stéphanoise.

Zaltan Antinote, en action. -
Zaltan Antinote, en action.

On vous passe le récit heure par heure, ne retenons que l'essentiel : le Positive Education est un festival familial. Non, certainement pas question d'y emmener vos enfants ou l'occasion de montrer à votre maman ce à quoi vous vous usez les oreilles en club. Ils ne s'en remettraient pas. Un festival monté par une petite famille, et qui fonctionne sous le signe du collectif, au plus beau sens du terme. D'ailleurs, une bonne partie de ce qu'on a retenu de mieux gravite autour de la galaxie Positive Education ; Low Jack, deuil1500, Epsilove, les Pilotwings, le collectif Boulevard... Tous des proches, "des amis" nous affirme les têtes pensantes du festival (Charles Di Falco et Antoine Hernandez, DJ en duo sous le nom Les Fils De Jacob). Tous les artistes peuvent être rassemblés sous la bannière indus, au sens très large- telle que le festival contribue à la forger. Une identité bien musicale bien particulière – jusqu'à influencer les artistes présents ? Le live des Pilotwings était tout en cold et en synth, alors qu'ils ont passé l'été à jouer le jeu baléarique, cheveu long et percussions midis, et Epsilove n'a jamais semblé aussi à l'aise que dans un hangar ; c'est le meilleur live qu'on ait vu depuis son échappée en solo.  Un rendez-vous pour toute une communauté d'artistes, et l'occasion pour eux de montrer les évolutions récentes de leur projet – comme le nouveau live de Maoupa Mazzocheti en guitar hero, ou l'impressionnant dj set de Low Jack et ses nouvelles lubies glacial dancehall.

On n'a aucune idée de la fraîcheur du live de Credit 00, mais sa performance fut l'une des plus mémorables du festival, on en profite pour le glisser ici. Beaucoup de nouveautés et de newcomers donc, sous l'égide des stars du genre, présentes et passées. Le festival s'est chargé de faire le trait d'union entre la nouvelle garde et les précurseurs du genre avec un membre de Front 242, le nouveau projet d'un membre de Nitzer Ebb ou la reformation de Trisomie 21... Un hommage un peu trop "nos plus belles années" pour ces derniers, mais une programmation définitivement cohérente (un peu trop ?), un peu trop monolithique diront certains, portée par une volonté didactique ? Finalement bien nommé, le Positive Education fait la leçon, pour un public de plus en plus connaisseur.

Public de conaisseurs.  -
Public de conaisseurs. 

C'est toute une vision de la musique que Positive Education aura présenté. Une esthétique bien propre et en perpétuelle évolution : "il y a un an, je mixais que de la techno" se rappelle Antoine Hernandez. Les aspirations du collectif sont aujourd'hui bien plus hétéroclites, à l'image des influences portées par les label Macadam Mambo, BFDM, ou toute la scène de Düsseldorf, qui montre la voie. Une finesse et une variété qui puerait l'OPA sur les musiques underground si on ne connaissait la sincérité et la fidélité du collectif. Difficile en effet de parler de véritable calcul marketing quand on assiste à cette assemblée de potes, sur scène comme dans le public, comme la réunion des hérauts de cette mouvance (Iueke, Phuong Dan, Sacha Mambo, Tolouse Low Trax et Vladimir Ivkovic) pour toute une nuit, attendu comme le point d'orgue par beaucoup, et qui fut à peu près conforme à ce à quoi il fallait s'attendre- de haute volée, mais un peu trop décousu. Un équilibre fragile, à l'image du festival ; une somme au final assez juste. Fort de son enracinement comme de son ouverture sur la scène européenne, le Positive Education montre au final une musique unique, et neuve : celle de 2017.

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Toutes les photos sont de l'auteur.