Ultimate Painting, le side-project de pop ligne claire de Jack Cooper de Mazes et de James Hoare de Veronica Falls, poursuit son bonhomme de chemin en toute décontraction et livrera demain cet impeccable Dusk qui sort comme ses deux prédécesseurs sur Trouble In Mind, le label américain à qui on ne la fait pas en termes de pop moderne aux parfums psyché 60’s (Jacco Gardner, The Limiñanas, Maston…).
Né après avoir partagé l’affiche sur la même tournée européenne, Ultimate Painting est depuis le début le fruit d’une entente parfaite entre deux musiciens aux goûts très proches : ''Au cours de la tournée Mazes/Veronica Falls, on s’est aperçu que l'on avait beaucoup d’idées musicales similaires. On a décidé de faire quelques enregistrements ensemble à notre retour dans mon home-studio, et un certain temps après nous avions suffisamment de chansons pour faire un album.'', raconte James.
Couchées comme à l’accoutumée sur bandes analogiques dans l’appartement londonien de Hoare, les chansons ont ici gagné en sagesse et en simplicité, elles s’avancent avec douceur et immédiateté, droites dans leurs bottines, comme un krautrock joué par Tom Verlaine et Antonio Carlos Jobim à l’heure du noir serré, une baie vitrée donnant sur un splendide lever de soleil. Dès l’ouverture "Bills", suivi du single "Song for Brian Jones", on se réjouit de retrouver au top de sa forme cette pop sans chichis, romantique et désinvolte, qui semble venir assez naturellement à ses auteurs : ''Nous passons beaucoup de temps sur la mise en son global de nos disques, et sur celui-ci plus particulièrement encore, pourtant, et c'est peut-être un peu fourbe de dire ça, nous ne réfléchissons pas vraiment midi à quatorze heures sur ce que nous voulons faire, les choses viennent assez naturellement. Ce n'est pas forcé.'', nous explique James. Le son est d’une nudité spartiate non dénuée d’un érotisme languissant, quelques parties de Wurlitzer éparses viennent réchauffer l'ambiance telles des lampadaires dans le fog anglais ("Lead The Way" ou "Monday Morning", "Somewhere Central"), le tout est porté par le jeu de batterie sobre, linéaire, mais parfois presque jazzy par son élasticité de Melissa Rigby.
Avec leurs méthodes très ''à l’ancienne'' de travail et le dépouillement de leurs productions, on en vient à leur demander comment ils se situent sur la carte de la pop actuelle, entre les innombrables projets revivalistes bourrés d'effets qui inondent la place de l’indie pop et le RnB mainstream ultra botoxé, on ne sait plus trop comment aborder un groupe aux compos simples comme bonjour, pas forcément d'une grande originalité, mais pourtant aussi vénéneuses qu’émouvantes, et reposantes par leur non-recours aux artifices. Ils nous expliquent très humblement qu’ils s’en fichent comme de l’an 40. Et Jack de préciser : ''Je ne crois pas que nous allions bien dans la pop actuelle et en même temps je ne crois pas que nous soyons rétro pour autant... Je crois qu’on a simplement nos propres méthodes, notre façon de voir les choses. Je pense que tout le monde va se rendre compte à un moment qu’il est contre-productif d’enregistrer avec des ordinateurs. Le cerveau humain n’est pas capable d’assimiler la quantité de données qu’il y a dans un disque de pop actuelle. Et quand je dis pop, j’entends par là les groupes qu’on entend sur 6Music ou sur Pitchfork. La plupart des chansons de RnB ou de Hip-Hop sont en fait très très très simples… mais il y a dedans tellement de choses à assimiler''. Quant au terme rétro, James ajoute que s’il peut avoir parfois des intentions revivalistes, Ultimate Painting n’est pour autant pas du tout un groupe rétro. ''La liste de nos sources d’inspiration est infinie, mais je crois qu'entre nous l’accent est porté sur la simplicité et la qualité du songwriting. Je crois qu'il y a certains types d’émotions et certaines fréquences qui nous relient. Cet album est de loin celui où nous avons réussi à créer un sentiment similaire à des choses que nous adorons comme Astrud Gilberto, Sun Ra, Meddle de Pink Floyd, le disque de Ralf und Florian (la moitié la plus lunaire et spatiale de Kraftwerk)…"
Le but n’est pas de sonner pareil, les deux comparses d’Ultimate Painting sont surtout des romantiques. Si ce qu'ils recherchent est perdu et impossible à obtenir, ils accèdent tout de même à une certaine forme de grâce. Et c’est déjà pas mal.
Dusk est commandable ici.
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