Le 104 se met samedi 9 juillet à l’heure new-yorkaise pour une nuit de dérives dans différents espaces du site, les programmateurs adaptant ainsi au lieu l’esprit crossover de la big apple, où les initiatives expérimentales croisent les formes pop et où tous les décloisonnements sont autorisés. Selon Marie-Pierre Bonniol, fondatrice de l'agence Julie Tippex et co-programmatrice avec Pascal Régis :
"New York a une dynamique particulière, notamment sur les décades des années 70 et 80, où la porosité entre musique et arts plastiques, ainsi que la culture populaire et celle d'avant-garde, était particulièrement vibrante et transformait la ville en laboratoire d'expérimentation géant où Madonna, Jean-Michel Basquiat, Arto Lindsay et Philip Glass pouvaient se trouver dans le même club au même moment. Notre programmation essaie d'avoir cette dynamique transversale, en mélangeant rock expérimental, musiques électroniques, hip hop, musique contemporaine, improvisée, mais aussi projections, installations et propositions azimutées, notamment cette carte blanche à Lee Ranaldo et Leah Singer où nous sommes en train de regarder comment accrocher des guitares depuis le plafond des écuries du CENTQUATRE!
Mais surtout, notre angle était de proposer une histoire, en une nuit, des différentes décades d'expérimentations de New York, depuis les années 50 avec le tribute à Moondog joué par ses musiques Stefan Lakatos et Dominique Ponty jusqu'à aujourd'hui, avec les expérimentations décomplexées de Tyondai Braxton, le fondateur de Battles, entre rock, funk, musiques électroniques et jazz, en passant par la no-wave avec la présence de Mark Cunningham du groupe Mars pour une création avec Pierre Bastien, le funk minimal avec Sal P de Liquid Liquid en DJ set, le groupe Dälek plus spécifiquement du New Jersey et leur croisement entre rock et rap sombre qui raconte à sa façon le début des années 2000, ou encore Rhys Chatham, Charlie Looker des groupes Extra Life et Dirty Projectors et leurs propositions crossover. Jacqueline Caux présentera aussi un film sur les compositeurs minimalistes, Rosa Vertov des vidéos sur des artistes féminines new-yorkaises et Patrick Vidal recréera la bande son de son séjour à New York en 1978 quand il enregistrait l'album de Marie et les Garçons avec John Cale. Brian Turner de WFMU, radio culte de New York et du New Jersey, reconnue internationalement, nous accompagnera également toute la soirée ! Angle historique, donc, mais aussi vivant car cette programmation est d'abord articulée autour de performances. Les possibilités de circulation du CENTQUATRE, en tous cas, nous ont beaucoup inspirés, peu de lieux permettant la dérive dans Paris."
Les festivités seront prolongées avec des activités proposées par des start-ups incubées au 104, Aurasens (fauteuil massant au rythme de la musique), Obilab (batterie en carton transportable), Digital Essence (pyramide optique qui évolue visuellement au rythme du mix du dj) et d’autres encore... + un stand à hot-dogs (Kitchen Mood) et des coiffeurs (Messieurs-Dames). On a envoyé un petit questionnaire aux artistes de la soirée. Il n’y en a que trois qui ont répondu, les réponses sont ci-dessous. Par contre Lee Ranaldo a demandé si on pouvait lui prêter une guitare acoustique, et puis des gongs aussi, sur lesquels il voudrait lancer des patates, si on a bien compris… An American in Paris, quoi, La Bohème…)
Stefan Lakatos (Tribute to Moondog)
Vivez-vous à New York, ou y avez-vous vécu ? Si oui, dans quel quartier ? Qu’est-ce qu’elle a de si spécial, cette ville, selon vous ?
J’ai visité New York et j’y ai joué quelques fois. J’ai présenté la musique de Moondog au Carnegie Hall en 2007. Les gens y sont toujours ouverts d’esprit et amicaux, ils ont l'humour, et il y a de grands musiciens dans cette ville. On peut également y trouver les meilleurs cheescakes du monde.
Qu’est-ce qui serait, selon vous, spécifiquement "new-yorkais" dans votre production artistique ?
La percussion trimba inventée par Moondog, jouée sur le trottoir devant The Owl.
Certains disent que New York produit le même effet sur les gens que la cocaïne. Est-ce que NYC produit chez vous (et comment cela se traduit-il dans votre pratique artistique ?), ce genre d’effets ?
Je ne connais rien à la cocaïne. Je ne prends pas de drogues, à l'exception du café, du bon vin, de la bière, et de la musique. Ce qu’il y a de bien avec la musique de Moondog, c’est qu’elle est addictive.
Excitation, accélération du battement du cœur ?
Avec de l’amour et de la musique, the beat goes on.
Réchauffement de la température du corps ?
J’ai des facultés poikilothermiques.
Désinhibition, sociabilité ?
Peau contre peau, beat sur beat, we come together.
Sentiment de puissance ?
Avec la puissance du rythme de ma batterie, face à un public, et si l’ambiance est bonne, je peux les emmener en voyage avec moi.
Descente, cœur brisé ?
Je tombe amoureux tous les jours. Mais je n’aime pas les cœurs brisés. Non.
Quels sont vos artistes new-yorkais favoris, et pour quelles raisons ?
Faucon Alfredson, un peintre suédois exceptionnellement doué vivant à Chelsea. Vous devriez aller voir ses peintures étonnantes, dans un style mêlant surréalisme et fantasy. J'aime lire Paul Auster, car tout se connecte à la fin. J'aime aussi la poésie de John Ashbery, ses mots me portent vers de nouvelles pensées, de nouvelles associations et dans des lieux situés dans d'autres dimensions. Sinon, une playlist de ce que j’écoute : Frank Zappa and the Mothers of Invention, The Fugs, Ian Anderson and the Jethro Tull, Captain Beefheart, The Holy Modal Rounders, John Zorn, Sun Ra, The Beatles, Paul McCartney, John Cage, Spike Jones and his City Slickers, Rashaan Roland Kirk, Björk...
Les différentes scènes new-yorkaises et beaucoup d’artistes présentés ici ont pour caractéristiques de varier, diversifier ou mélanger les pratiques artistiques. A côté de vos travaux présentés à Paris, avez-vous d’autres activités, dans d’autres disciplines (musique, littérature, photo, cinéma, peinture…), que vous pourriez nous présenter ?
Je suis peintre à l’origine, mais je ne peins plus. Parfois, je fais des petits travaux sur cuir pour me détendre l’esprit, et en même temps garder mes doigts occupés…
(c) Renaud Monfourny
Rhys Chatham
Vivez-vous à New York, ou y avez-vous vécu ? Si oui, dans quel quartier ? Qu’est-ce qu’elle a de si spécial, cette ville, selon vous ?
Je suis né à Manhattan au New York Hospital. Mes parents étaient des beatniks qui vivaient à Greenwich Village dans les années 1950. Nous avons vécu sur MacDougal Street et plus tard déménagé dans le quartier de Gramercy Park. Lorsque je suis parti de chez mes parents en 1970, j’ai emménagé dans un loft à Soho. Je payais 180 $ par mois pour 165 mètres carrés. Les artistes, sculpteurs, chorégraphes et musiciens venaient habiter dans ce quartier parce qu'il était composé de petites usines et que personne ne voulait y vivre, sauf nous. Pour les artistes, c’était super : il y avait beaucoup d'espace et les loyers n’étaient pas chers. C’était avant l'Internet, il y a une vraie histoire d'artistes qui vivaient tous près les uns des autres, rassemblés dans une zone spécifique pour partager les mêmes rêves. Au début des années 1970, nous étions à Soho, puis, tout le monde est parti à Tribeca, puis, au milieu des années 1980, dans l'East Village, le seul endroit à Manhattan qui était assez bon marché pour nous. Enfin après ça, tout le monde a déménagé à Brooklyn. Aucun artiste ne peut se permettre de vivre à Manhattan aujourd'hui, à moins de s’appeler Brad Pitt !
Qu’est-ce qui serait, selon vous, spécifiquement "new-yorkais" dans votre production artistique ?
De 1976 jusqu’à la fin des années 70, il y avait une ambiance particulière et d’énergie qui se concentrait autour des clubs de rock CBGB et Max Kansas City. C’était extrêmement excitant. Nous allions voir des gens comme Patti Smith, Television, Richard Hell et les Talking Heads qui jouaient là, et bien sûr les Ramones. La saveur de cette énergie était particulière à New York. L'énergie à Londres était incroyable aussi, mais le goût était différent ! Si l'on voulait la saveur de New York, la seule solution était d’y aller.
Certains disent que New York produit le même effet sur les gens que la cocaïne. Est-ce que NYC produit chez vous (et comment cela se traduit-il dans votre pratique artistique ?), ce genre d’effets ?
Il y a une expression que j’ai lu dans un roman de William Gibson : "Aussi vite qu'une minute de New York". Les choses se passent bien plus rapidement à New York. Il est si facile d’y trouver des gens avec qui collaborer, même aujourd'hui.
Quels sont vos artistes new-yorkais favoris, et pour quelles raisons ?
J'y ai grandi. Il y a tant d'artistes que j'aime qui y vivent, la liste est trop longue. Ce serait comme demander quelle est ma couleur préférée. Ma couleur préférée est le noir et le bleu. Pourquoi ? Je ne sais pas, je vais demander à mon psy et je reviens vers vous.
Avez-vous d’autres activités, dans d’autres disciplines (musique, littérature, photo, cinéma, peinture…), que vous pourriez nous présenter ?
Je ne fais que de la musique.
Mark Cunningham
Vivez-vous à New York, ou y avez-vous vécu ? Si oui, dans quel quartier ? Qu’est-ce qu’elle a de si spécial, cette ville, selon vous ?
Je vis à Barcelone désormais, mais j’ai grandi juste à l'extérieur de New York et vécu dans l'East Village entre 1974 et 1991. Pour moi, l'aspect le plus spécial de NYC à cette époque, c’était la mixité ethnique, sociale, culturelle et économique. Dans les années 1970, c’était également une ville pas très chère à vivre, ce qui a permis un grand afflux d'étudiants et d'artistes de partout dans le pays. L'énergie créatrice de ces années était différente de tout ce que j’ai vu ailleurs depuis. Je ne peux pas vraiment parler de la ville maintenant, mais je ne peux qu'espérer qu’il reste quelque vestige de cette époque.
Qu’est-ce qui serait, selon vous, spécifiquement "new-yorkais" dans votre production artistique ?
Ma façon de jouer, complétement, qui s’est développée avec la No Wave des années 1970 et a été fortement influencée par les mouvements parallèles à New York du minimalisme et du free jazz.
Certains disent que New York produit le même effet sur les gens que la cocaïne. Est-ce que NYC produit chez vous (et comment cela se traduit-il dans votre pratique artistique ?), ce genre d’effets ?
Peut-être, mais ces éléments sont universels dès qu’il y a une combinaison d'urbanisme et de vie artistique : intensité de la création, immersion dans la subjectivité, expériences des limites. L'intensité est nécessaire à la création, pour moi en tout cas - sans passion et conflit, la création est stérile. La vie à New York a cette intensité, qui se reflète dans tous les mouvements artistiques qui sont nés là-bas.
Quels sont vos artistes new-yorkais favoris, et pour quelles raisons ?
Andy Warhol & The Velvet Underground, qui m’ont permis de débuter. La génération de groupes de 1974 : Patti Smith, Television, Suicide etc., qui nous montraient que tout était possible. Charlemagne Palestine, pour la transcendance. La scène free loft jazz loft et tous ses musiciens, pour la pure l'énergie et la liberté.
(c) Marc Broussely
Lee Ranaldo (on a laissé les majuscules, puisqu'il a répondu comme ça)
Vivez-vous à New York, ou y avez-vous vécu ? Si oui, dans quel quartier ? Qu’est-ce qu’elle a de si spécial, cette ville, selon vous ?
OUI JE VIS TOUJOURS A NEW YORK - EN CENTRE-VILLE, A TRIBECA - J'Ai VECU DANS CE QUARTIER QUASIMENT TOUT LE TEMPS QUE J'AI PASSE A NYC, DEPUIS 1979. NEW YORK EST UN CENTRE CULTUREL ET UNE VILLE INCROYABLE - TOUJOURS CHANGEANTE, TOUJOURS SURPRENANTE ET INTÉRESSANTE. UNE DES PLUS GRANDES VILLES DU MONDE, C'EST TOUJOURS FASCINANT D'ÊTRE ICI ET DE FAIRE PARTIE DE LA CULTURE ICI.
Qu’est-ce qui serait, selon vous, spécifiquement "new-yorkais" dans votre production artistique ?
NEW YORK AFFECTE CHAQUE ARTISTE QUI VIT ICI - LES MONUMENTS, LES SONS, LE BRUIT ET L'ENVIRONNEMENT CHAOTIQUE - CETTE VILLE INFILTRE LA CONSCIENCE ET INFLUENCE NECESSAIREMENT TOUS LES ASPECTS DE LA PRODUCTION ARTISTIQUE. C'EST IMPOSSIBLE A DECRIRE EN QUELQUES MOTS, MAIS L'ENERGIE DE CET ENDROIT A UN EFFET TRES FORT SUR QUICONQUE VIT ET TRAVAILLE ICI.
Certains disent que New York produit le même effet sur les gens que la cocaïne. Est-ce que NYC produit chez vous (et comment cela se traduit-il dans votre pratique artistique ?), ce genre d’effets ?
C'EST UNE COMPARAISON STUPIDE QUI EST ESSENTIELLEMENT DENUEE DE SENS. OUI, NEW YORK VOUS FAIT MONTER TRES HAUT ET VOUS FAIT DESCENDRE AUSSI TRES BAS - TOUTES LES EMOTIONS AUXQUELLES VOUS POUVEZ PENSER SONT POURVUES PAR CETTE VILLE.
Excitation, accélération du battement du cœur ?
YES
Réchauffement de la température du corps ?
YES
Désinhibition, sociabilité ?
YES
Sentiment de puissance ?
YES
Descente, cœur brisé ?
YES
Quels sont vos artistes new-yorkais favoris, et pour quelles raisons ?
LA LISTE EST TROP LONGUE – LA, TOUT DE SUITE , IMMEDIATEMENT, JE DIRAIS : ROBERT SMITHSON, MEREDITH MONK, PHILL NIBLOCK, RITA ACKERMAN, LOUISE BOURGEOIS, BRICE MARDEN, ARTO LINDSAY, GLENN BRANCA – LA LISTE PEUT CONTINUER INDEFINIMENT
Les différentes scènes new-yorkaises et beaucoup d’artistes présentés ici ont pour caractéristiques de varier, diversifier ou mélanger les pratiques artistiques. A côté de vos travaux présentés à Paris, avez-vous d’autres activités, dans d’autres disciplines (musique, littérature, photo, cinéma, peinture…), que vous pourriez nous présenter ?
JE TRAVAILLE DANS LA MUSIQUE ET AUSSI DANS LES ARTS VISUELS ET L’ECRITURE - ET J’AI PARFOIS PRESENTE DES TRAVAUX CORRESPONDANT A TOUTES CES DISCIPLINES - Y COMPRIS UNE EXPOSITION A PARIS AU CNEAI EN 2009 – VOIR ICI TOUTES CES ACTIVITES SE CHEVAUCHENT ET S’INFLUENCENT RECIPROQUEMENT DE PLEIN DE MANIERES DIFFERENTES.
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