De Saul Bass (1920 - 1996), l'histoire du cinéma a surtout retenu les mirifiques génériques et affiches pour Hitchcock, Preminger ou Stanley Kramer - si mirifiques en fait que les docus qui existent sur lui ne parlent quasiment que de ça, et de la collec de logos totémiques qu'il a dessiné pour Minolta, Warner ou Kleenex.
Mais l'Américain a aussi tenté quelques fois sa chance derrière la caméra. Adoubé par un Oscar pour le documentaire d'animation Why Man Creates, il s'est même lancé en 1974 dans l'aventure du long métrage de grand studio avec Phase IV, fantaisie SF rapidement sanctionnée par un gros bide au box-office mais jamais oubliée par les nerds malgré tous les efforts de la Paramount pour l'enterrer plus profond que l'Enfer.
A découvrir le film 38 ans plus tard, on comprend tout de suite pourquoi. L'histoire a beau fouetter très fort le 2001 en papier mâché (suite à un événement astral inexpliqué, une armée de fourmis noires mutantes super intelligentes décide de s'en prendre aux hommes et aux animaux; un entomologiste et un mathématicien sont missionnés pour tenter de communiquer avec elles), le découpage, la photo, l'architecture à l'écran sont presque en permanence renversants d'étrangeté et de beauté. Comme dans le fantastique Mystère Andromède de Robert Wise, la majorité de l'action se déroule en laboratoire, et toutes les vues des "monstres" sont des macros sublimes de véritables fourmis en action (même les très bunueliens plans où on les voit sortir des mains toute mandibules dehors).
A noter pour les amateurs d'obscurités musicales que la b.o. signée Brian Gascoigne, tour à tour synthétique malsaine ou symphonique mélancolique, ne ressemble à rien de connu non plus. Au cas probable où vous n'auriez pas prévu de sortir écouter du reggae ce soir, on vous conseille chaleureusement de fermer les rideaux et de vous le mater en entier.
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