On continue notre apologie des rééditions de LP déviants qui ont eu un rôle-clef dans la construction de la techno telle qu'on l'entend aujourd'hui sur les festivals de France et de Navarre. Au-delà des clichés et de Sonic Destroyer, la techno de la Motor City qu'on a tous en tête a peu à voir avec une musique manufacturière de bruits d'usine et de toile fracassée. Rarement dégénérescente comme l'EBM de ses descendantes belges ou allemandes, parfois violente mais jamais aliénante, elle a surtout fait la part belle aux atmosphères mélancoliques et aux nappes de synthétiseurs pénétrants.
Sorti en 1989, à une époque où le son de Détroit était encore entre deux eaux, le premier album de Final Cut fait exception à cette définition cosmique d'une techno puriste au point qu'on en écouterait presque ses classiques d'une oreille différente. On y entend autant les prémisses d'Underground Resistance (formé quelques mois plus tard par Mike Banks, Robert Hood et Jeff Mills) qu'une résurgence de Front 242 et de Nitzer Ebb, soit une electro-techno au marteau et au burin héritière de l'esprit transgressif de la musique industrielle du Vieux Continent.
Pour le lien avec Underground Resistance, l'explication coule de source puisque Final Cut est l'initiative d'Anthony Srock, DJ et fondateur du label Full Effect records, et de Jeff Mills, alors tout minot. Pour mieux comprendre ce que la musique du duo doit à l'extase indus, il suffit découter les disques suivants du groupe, enregistrés sans Jeff Mills, et qui lâchent complètement les riddims house au profit de bruits d'usine en bonne et due forme.
Mais le plus important qui concerne Deep Into The Cut est sans doute moins son importance historique que la musique très juvénile et très excitante qui y explose à chaque mesure. Vous connaissez déjà peut-être "Take Me Away", tube quasi culte qui aurait pu faire de l'ombre au "Good Life" d'Inner City, mais peut-être êtes-vous passé à côté du premier album tour de force dont il est tiré. Il est aujourd'hui réédité pour notre plus grand bonheur par We Can Elude Control, le label de Paul Purges alias Emptyset qui a notamment sorti plusieurs disques de Peder Mannerfelt. L'occasion de découvrir un autre versant de la techno de Détroit à son âge le plus excitant. On vous a trouvé quelques extraits du disque sur YouTube en attendant le LP qui sortira en double vinyle le 19 février, et on vous encourage à aller faire un tour sur le site de The Wire où il est streamé intégralement.
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