Le sixième album de Liars s'appelle donc WIXIW et à l'image du paradoxe en mouvement du titre de son morceau d'ouverture ("The Exact Colour of Doubt", chapeau bas) et du palindrome qui habille son artwork sec comme un panneau d'autoroute, il s'intéresse exactement à la Zone magique qui sépare toujours, 2000 ans de philosophie dans le dos, le signifiant du signifié. Car qui sommes nous finalement pour camper sur nos ego et nos certitudes quand l'intégralité des interrogations censées de l'homme raisonnable le mène vers un puits sans fond de questions sans réponses ?
On vous la fait en faisant mine d'embrasser la naïveté du projet (du bout des doigts) mais pour une fois c'est justifié au-delà de la touchante métaphysique de comptoir de nos coeurs de rockers (à de rares exceptions bien sûr, il est chaleureusement déconseillé de suivre une pop star qui décide d'entreprendre une réduction phénoménologique ou une déconstruction derridienne pour nourrir ses ébats musicaux): WIXIW est fait de la même étoffe que le bouillonnement intérieur évoqué ci-avant et peaufine une dynamique forme humble/effet maousse inédite où rien n'explose ni ne déborde dans les enceintes (comme, au hasard, sur le précédent Sisterworld) mais tout agit au moins une fois et demi plus fort.
Pas loin du nuancier de textures, WIXIW se pare en fait d'apparats passablement léthargiques pour mieux acérer la finesse de son jeu sur les intensités, enchaîné tel un catalogue de propositions (presque toutes) synthétiques: electronica des Cornouailles grise et jamais ostentatoire, ballade mybloodyvalentinesque trempée dans une baignore de codéine, épisodes de blues nocturne à la Gimme Shelter, myriade de petits prodiges synthétiques qu'on frétille de découvrir comme autrefois les cadeaux dans les paquets de lessive.
Surtout, l'ensemble se tient avec une subtilité lyrique qui pêche dans 95% des disques d'indie rock criards qui nous saoulent depuis cinq ans. La postérité n'est pas prête de livrer son sésame d'entrée mais l'ampleur est celle d'un grand disque, intense par l'envers et miraculeusement débarrassé des scories pleurnichardes, des crâneries formelles et des faux excès surjoués de bruit ou de fureur qui restent les trois mamelles du rock arty de ce début de décennie.
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