Oh là là, ça se mélange dans ma tête - 1998, 1999, la boutique Wave rue Keller, les articles sur Alec Empire dans Octopus, les premières conneries sur Rephlex, un mec dans ma classe qui me propose de l'accompagner à une teuf acid core avec les Spiral, les reportages sur les Heretik au journal de 13h, l'insoutenable pression de choisir un camp entre Detroit et la techno écrite avec un K.
C'était il y a une petite éternité et je me rappelle mieux la confusion dans ses grandes lignes que dans ses détails; je me souviens pourtant que j'ai vu une sorte de lumière le jour où j'ai acheté mon premier cédé de DMX Krew. Outre le fait qu'Ed Upton recopiait déjà la pop de 1986 comme personne (et facile 5 ans avant que le reste de la nation techno se mette au diapason), il ridiculisait à la fois les puristes des bacs à nouveautés et les beaufs gobeurs atroces qui utilisaient des expressions genre "100 kilos de son". Pas ironique pour un pound, sa musique maligne pensait déjà passionnément la dance, son histoire, son passé, son futur, et ses millions de contradictions. D'un maxi à l'autre, on savait que tout pouvait arriver, une connerie acid ou un hommage de gringalet transi à Whodini et c'était bien, ça militait involontairement pour l'amitié et l'élévation des peuples.
Presque quinze ans plus tard, une petite poignée de niches mises à part, on est tous une grosse bande de chouettes copains snobs qui sautent sans état d'âme de Mac DeMarco à un maxi de Morphosis et Ed nous sort quasi coup sur coup deux maxis d'acid gabber d'after, bien entendu bricolée pour les nerds (cf. le clip et sa collection de boîtes à rythmes de légende, RSF SD-140, TR-808 et 909) plutôt que pour les petits enfants de travellers. Pour lui, rien n'a changé; pour nous, presque tout. Je me demande ce que j'aurais pensé de "Cerberus" si je l'avais découvert sur la platine d'un disquaire en 1999. Je pense pas que je l'aurais acheté.
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