A tous les soldats ulcérés du "c'était mieux avant" qui ne peuvent s'empêcher de dégainer un RIP Youtube d'un LP de synth punk moldave jamais rééditée quand on leur demande "ce qu'ils écoutent en ce moment", on pose la question très sincèrement: à la lumière aveuglante de leur savoir auguste et encyclopédique, en quelle autre année que celle en cours auraient pu sortir les deux morceaux ci-dessous?
On pose aussi la question parce que de notre côté et de notre point de vue mitigé, on n'en a aucune idée. Toujours seuls à l'avant-poste très étrange qu'ils se sont créé de toutes pièces sur ce très étrange Re:ECM où ils s'appopriaient très idiosyncrasiquement les matières vaporeuses du grand label inclassable de Manfred Eicher, Max Loderbauer (de NSI, Ambiq, Sun Electric etc.) et Ricardo Villalobos (dit "Le Villal') prolongent sur Safe in Harbour à la fois le catalogue "minimal house de bruits de balles de ping pong qui rebondissent sur de la neige fraîchement tombée" de Perlon et une certaine idée du jazz aérien, spatialisé et souvent électronique tel qu'il se pratiquait en Europe ou en Asie dans les années 70, quelque part entre les effets de manche de plus en plus assourdissants du jazz rock et les terres de plus en plus arides du free jazz, et dont une quantité non négligeable paraissait justement sur ECM.
Une fois qu'on a dit ça, on n'a pourtant pas dit grand chose: ce qui se passe dans ces étranges polyrythmies d'infrabasses et de caisses claires en cuivre (samplées? synthétisées?) n'a évidemment rien à voir ni avec le jazz, ni avec la techno... Encore moins avec l'ambient, dont Villalobos et Lauderbauer proposent tout de même une alternative en termes d'usage pour le mélomane-enfermé-en-bureau contemporain: à la fois immobiles et en évolution permanente, ces soundscapes à la fois plein et dépeuplés, dont les ambiances délétères reposent sur quelques volutes de vibraphone lointain s'écoutent sans doute le mieux quand ils s'oublient, en accompagnement de quelque activité point trop absorbante (comme l'écriture d'une notule de blog de cette échelle et de cette envergure). De la cocktail music digne et raisonnablement futuriste, en somme, qui arrive à point nommé en magasin cette semaine pour nous aider à affronter la canicule (avec un peu de rosé de bonne qualité en rab', quand même, parce que faut pas déconner, on est pas des chiens).
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