Pour ses compositions, Terry Riley (et l'ensemble de l'avant-garde minimaliste américaine) n'a eu de cesse de puiser dans les musiques traditionnelles africaines. Si vous avez des doutes là-dessus et êtes de ceux qui croient en l'hégémonie musicale occidentale, n'hésitez pas à ranger vos relents colonialistes douteux au placard et allez lire Le Silence, les couleurs du prisme et la mécanique du temps qui passe, recueil de textes et entretiens du critique et musicologue Daniel Caux s'étalant de la fin des années soixante à aujourd'hui. Cela devrait vous remettre les idées en place.
Petit rappel pour les néophytes de passage. Souvent classés dans les musiques dites "sérieuses", les courants répétitifs (et avant cela sérialistes) sont avant tout la recherche d'un état de transe (si le premier conseil de lecture ne vous a pas rassasié, allez jeter un oeil sur les travaux de Gilbert Rouget). Ne l'oublions jamais, malgré tout ce que nous enseignent les musicologues les plus aguérris, Terry Riley a écrit les plus grandes de ses oeuvres sous acide. Musique savante oui, mais dans sa branche psychédélique hippie. In C, littéralement "en do", est la lecture occidentale hallucinée de rites chamaniques ancestraux afro-indiens.
Ne vous fatiguez donc pas à froncer le moindre sourcil lorsque vous apprendrez que le groupe malien Africa Express donne sa propre version de l'oeuvre, qui vient tout juste de souffler sa cinquantième bougie. Rappelons que la partition, répétition aléatoire de cinquante-trois phrases musicales par un nombre indéfini de musiciens, fascine par ses possibilités d'interprétation illimitées (on vous avait parlé de la lecture tout en guitare de l'ex-membre de Portishead : Adrian Utley). Il ne manquait à cela que les talents du producteur, africain par le coeur, Brian Eno, et la médiation de Damon Albarn le missionnaire (toujours dans les bons plans) pour donner une variante somptueuse à cette oeuvre intemporelle. Allez, un peu de patience, les anglais de Transgressive Records s'occupent de la sortie (vinyle et digitale) prévue pour le 26 janvier.
UPDATE : Le morceau s'écoute désormais en entier avec de belles images de Bamako.
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