C'est de loin le document le plus précieux à avoir émergé des tréfonds de Youtube cette semaine, et on en doit (une fois de plus) l'excavation au site américain Dangerous Minds. Punks and Posers est un documentaire long format produit par MTV USA au coeur des années 80 et chapeauté par Charles M. Young, journaliste chez Rolling Stone dont le premier fait d'arme est d'avoir écrit le premier article américain sur les Sex Pistols et le punk britannique, et dont on vient justement d'apprendre qui nous a quitté la semaine dernière à l'âge de 63 ans.
Au milieu des années 80, soit une bonne demi décennie après la déliquescence de la scène punk de L.A. (celle des Germs, de X ou des Go-Go's à l'époque où elles s'injectaient encore de l'heroïne) et une bonne demi décennie avant que Black Flag ou Minor Threat n'intéressent l'intelligentsia rock US, Young faisait partie des rares journalistes à ne pas avoir abandonné la cause. Comme il l'explique au présentateur blond peroxydé en préambule du film: "Le punk est une influence majeure sur le style des autres formes de pop. Les punks portaient des bracelets cloutés bien avant Ozzy Osbourne, et Madonna a copié son look sur les punkettes. Malheureusement, on ne parle jamais de ça. Je me suis dit que le temps était venu d'ouvrir aux punks les portes de MTV pour la première fois".
Vous avez bien lu: grâce à ce documentaire sur la scène punk californienne tardive (et, osons le mot, moribonde) du milieu des années 80, le punk rock a fait sa toute première apparition sur la fameuse chaîne musicale, dont les dirigeants n'avaient heureusement pas encore tout à fait intégré qu'elle était déjà devenue le modèle dominant de la culture populaire occidentale de son temps.
Concentré sur une "Pre Summer Party" à l'Olympic Auditorium de Los Angeles et des performances des locaux Raw Power, Plain Wrap et The Dickies et des Anglais (pas encore tout à fait cultes) de G.B.H., Punks and Posers ne contient aucune performance de légende mais confirme que les tranches de vie d'une scène captées en temps réel font toujours des meilleurs films que les pensums historiques. Outre le dispositif délicieux (des insiders et des outsiders commentent tour à tour l'existence de la scène dans le Los Angeles des années 80) et les footages de pogoteurs grimés en fluo, ce qui étonnera sans doute le plus le spectateur contemporain, avec sa tête remplie d'idées préconçues sur MTV et la pop pendant la décennie des yuppies, c'est qu'on y entend de la musique, beaucoup de musique. Quand on sait la part congrue réservée aux concerts et à la "musique actuelle" à la télévision, ici ou là-bas, en 2014, on mesure une fois de plus le chemin parcouru (que dis-je, la pente dévalée) en trois décennies.
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