A une autre époque, par exemple le milieu des années 70, une rencontre en studio des darons d'une scène du genre de celle des groupes ici regroupés - au diable l'avarice, appelons-la la "nouvelle pop psychédélique française" - aurait sans doute donné quelque chose de terrible : une démonstration de force, un concours d'étoffes guitar-héroïques, un gros gâteau de trop de couches capable de faire rendre son (feu) Keith Emerson au plus glouton des bouffeurs de notes par milliers.
Sous le patronage de la Lune, de la belle lumière jaune dont elle illumine doucement la surface de la Terre les belles soirées d'été et de quelques œuvres emblématiques de (feu) la modernité pop qui lui ont déjà tourné autour (citons au débotté Bert Jansch, le Ray Cathode de George Martin, Glenn Miller ou le magique "Song of the Second Moon" de Tom Dissevelt & Kid Baltan), Julien Gasc, Dorian Pimpernel et Forever Pavot (plus Chassol en bonus piano sur un morceau) ne cherchent pourtant sur leur premier disque commun que l'apesanteur et les raisons de leur amitié.
Tout est dans la question posée dans la deuxieme chanson de Moonshine vol.1 chantée par Julien Gasc et jouée avec Emile Sornin et Chassol, "Léger Léger" : mais comment font les feuilles des arbres, les satellites et les ptérodactyles pour voler ? Réponse qu'on pourrait habilement reformuler, plus près des intérêts du lecteur amateur des diverses expressions artistiques des gars de la bande venu écouter ce qu'ils valent quand ils ourdissent leurs chansons farfelues ensemble, en "mais comment font Julien Gasc, Dorian Pimpernel et Forever Pavot pour décoller à sept sur un tapis volant?"
Sans jamais répondre à la question, nos faiseurs de miracles en rang désordonné font tourner les instruments, les micros et le moleskine, se mélangent, s'abâtardissent et s'agglutinent en dépit du bon sens et des prédictions, font parler leurs plus viles obsessions musicales (Stereolab, Broadcast, Morricone) et leurs plus bas instincts byzantins (ésotérisme électronique, dandysme muzak, fausse naïveté) mais ne restent jamais collés au tarmac des médiocres et des asticots. En d'autres termes tout marche, tout glisse, tout est trop dense mais tout est si délicieux qu'on n'a qu'un désir, qu'une seule pulsion une fois arrivé au bout de ces six chansons toutes conçues comme des miroirs : battre les cartes et tout réécouter dans le désordre.
Moonshine Vol.1 sera disponible en magasins pour le Disquaire Day. La pochette est signé John Henriksson, co-patron de Tona Serenad, précieux label suédois dont on vous a souvent parlé. Et ça se précommande ici.
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