Nouveaux réacs, printemps français, identitaires, amis ou ennemis, une chose est sûre: personne ne pourra vous prendre au sérieux tant que vos diatribes paradoxales continueront - dans le meilleur des cas - à platement pleurer Brassens. Que les moins antisémites d'entre vous se touchent encore sur Gainsbourg n'y changera rien, et ne comptez pas jouer la carte Dutronc pour vous sortir de ce pétrin. Ce n'est pas une question de snobisme. C'est une question de crédibilité : tout passéiste qui se respecte devrait pouvoir citer au moins trois films avec Jean Yanne, sous peine de se voir coiffé au poteau par n'importe quel brocanteur de Clignancourt. Un bon français, ça vous sort illico une bonne dizaine de morceaux de Jacques Hélian. Ou bien ça file au rattrapage au Jeu des mille euros.
On votera Marine le Pen le jour où le "Discocorico" de Jean-Pierre Massiera ambiancera les meetings de campagne. Non-stop, entendons-nous bien: rythmant les entrées en scène, clôturant les interventions, en fonds sonore pendant l'intégralité des discours, tandis que le mec de la régie gère le ducking entre deux sandwiches Sodebo. Avec ça, on est tranquilles, personne ou presque là-bas ne connaissant Massiera, pas plus qu'Estardy ou Michel Magne, ni d'ailleurs aucun des producteurs de l'ombre qui ont façonné toute la musique populaire française de ces 50 dernières années. Ça devrait être votre boulot pourtant, non, les français de souche ? C'est vraiment pas de ma faute si tout le monde a préféré rester à la maison mater Breaking Bad...
La pochette, du meilleur goût, aurait pourtant du vous parler autant qu'à moi. Comme souvent en matière de disco chez Massiera, les morceaux se contentent d'une demi-molle, noyée dans un fonds de délire éthylique. C'est néanmoins très drôle, et forcément discocoricon, comme si la bite de Choron avait un peu trop traîné dans le fonds d'une quelconque coupe de champagne.
Aucune importance : Massiera est et restera cette sorte de dieu débonnaire qui, depuis son Studio 16 à Antibes, aux antipodes de Paris, orchestra en complément de ses activités régulières dans les années 70 de curieuses et officieuses sessions nocturnes et divagatrices, embarquant à son bord les musiciens du jour avec pour argument de poids son lot d'effets et de synthés analogiques, appuyé d'un généreux stock munitions viticoles. On a le droit de préférer sa période 69, où le psyche-prog flirtait aux confluents du jerk et du jazz. Mais en ces heures sombres pour notre pays, il serait fou de passer sous silence de tels efforts concourant à colmater courageusement les brèches qui minent un peu plus chaque jour notre belle identité nationale. Réédition ces jours, chez Favorite Recordings.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.