Vous l'avez probablement remarqué mais depuis quoi, deux ans, on bouffe du Sun Ra à toutes les sauces. Flying Lotus, Thee Satisfaction, Zombie Zombie, Goat et même cette endive de Pantha Du Prince (un poil après tout le monde) : tous ont trouvé dans l'héritage cosmique du maître une bonne excuse pour se déguiser, faire des morceaux de 13 minutes et très probablement prendre tout un tas de substances récréatives. 

Le 8 juin 1986, Sun Ra donne un concert à Coney Island (qui était un spot un peu tendu à cette époque) dans un des derniers freak shows en bord de plage, aux côtés de John Cage donc. Le public est mené à sa place par un Monsieur Loyal et on lui propose de la pizza gratuite (eh oui, les temps ont changé me direz-vous). Sun Ra évidemment part sur un gros avantage : il prend de la place (musicalement hein). Sa performance improvisée s'appuie sur ses synthés spatiaux et ses vocalises étranges, tantôt effrayantes tantôt aussi belles et prenantes que le chant des sirènes de l'Odyssée (pas très égyptien cette référence je vous l'accorde mais vous voyez ce que je veux dire).

Cage, chantre du silence, récite de son côté des poèmes, "Empty Words IV", comme il le faisait parfois en compagnie de moines bouddhistes. C'est évidemment lorsque Sun Ra comble les vides laissés par Cage que la performance devient folle et forcément psychédélique. Apparemment le concert s'est déroulé devant des nerds new yorkais abasourdis par ce qu'ils voyaient. 40 ans presque jour pour jour plus tard cette performance ressort en vinyl chez Modern Harmonic. Un conseil si vous n'êtes pas un adorateur de Satan : laissez la lumière allumée, ça fait quand même assez peur.