Combat de Maîtres, La mante religieuse, Les 8 diagrammes de Wu-Lang, Les 18 armes légendaires du Kung Fu... Tous ces films racontent un peu la même histoire: un mec se fait poutrer la gueule, survit, puis part s'entraîner pour revenir mettre sa raclée aux bad guys. Ce qui les rend si uniques, c'est l'étonnante poésie qui sourd sous chaque plan. Hypnotisé par la virtuosité des combats, terrassé par tant de beauté formelle, le spectateur finit par ne plus vraiment savoir si les personnages se battent ou s'ils dansent. Certaines scènes sans décors, seulement entourés de rideaux rouges et de halos lumineux, deviennent des moments de pure abstraction visuelle. Petit à petit, on se rend compte que le scénario et ses enjeux ne sont que prétextes: ce qui se déploie sur l'écran, c'est du mouvement, de la vitesse, c'est la poésie du corps.

L'artisan de ces ballets s'appelait Liu Chia-liang et il vient de rendre l'âme à l'âge de 77 ans. Avec lui, c'est tout un pan de l'histoire du cinéma de Hong Kong qui disparait. Descendant des disciples du grand maître Wong Fei-hung, Liu Chia-Liang s'est très tôt tourné vers le cinéma pour devenir l'un des fers de lance de la Shaw Brothers. Cette mythique boîte de production hongkongaise est devenue la plus importante de l'époque grâce aux succès de ses films de sabres, les Wuxiapian, directement inspirés des films de samouraï japonais. D'abord chorégraphe des combats pour Chang Cheh, autre grand nom de la Shaw Brothers et auteur de la trilogie du sabreur manchot, Liu Chia-liang est passé à la réalisation pour signer ce qui est sans doute le film de kung fu honkgongais le plus culte des années 70, La 36ème chambre de Shaolin, qui inspirera toute l'imagerie du Wu-Tang. 

Le maître a rejoint la 37 ème chambre. Bouddha soit loué, on vous propose de mater ou remater le trailer de La mante religieuse, film de 1978 dans lequel le protagoniste joué par David Chiang apprend à se battre en mimant les gestes de combat d'un couple de mantes religieuses.