Quand les bonnes gens de Freaksville nous ont envoyé ELA il y a quelques semaines et que l'éventualité d'un stream intégral de l'album a commencé à se profiler, j'ai immédiatement entrevu ce qui pourrait être la première phrase de l'article qui l'accompagnerait: "Jean-Jacques Perrey est notre Manoel de Oliveira à nous, les mélomanes freaks de la synth music hexagonale". Mais mauvaise nouvelle entre temps, le plus grand cinéaste portugais du XXème siècle dont le dernier accomplissement ne fut pas d'être le premier cinéaste centenaire actif de l'histoire du cinéma mais, c'est plus surprenant, l'enchaînement de trois chefs d'oeuvres vertigineux (Singularités d'une jeune fille blonde, L'Étrange Affaire Angélica et Gebo et l'Ombre) nous a finalement quitté le 2 avril dernier à l'âge de 106 ans.
En préambule de ce stream, je me permets donc de souhaiter au jeunot Jean-Jacques Perrey, 86 toutes petites années au compteur, de battre Manoel de Oliveira à plat de couture et de continuer à faire des disques jusqu'à au moins 130 ans (soit autour de l'année 2060). Je déclare mon voeu avec autant de ferveur que, loin des placards à naphtaline qui sont le lot habituel des musiciens de sa génération, les disques récents de Perrey puent tous la jeunesse à plein nez. Vivifié par l'intérêt sans cesse renouvelé pour sa musique de la part de la jeunesse électronique (au-delà de la tonne de tracks basés sur des samples de ses disques, citons les albums avec Cosmicpocket, Luke Vibert et le présent David Chazam évidemment) et les honneurs régulièrement faits à sa postérité (si vous n'avez jamais vu le fantasque et fantastique documentaire Prélude au sommeil de Gilles Weinzaepflen, sachez qu'il est toujours disponible en VOD ou DVD), Perrey continue à jouer la musique qu'il a inventée au milieu des années 60 avec The In Sound from Way Out avec un sens de l'invention sans cesse régénérés. Soit un mélange inimitable de jerk, de bruitages drôlatiques montés en cadence à la colle et aux ciseaux, de mélodies régressives et de virtuosités pianistiques jouées sur Moog dernier cri qui continue à défier avec distance et affection des avant-gardes électroniques et orchestrales toujours plus arides et arrogantes.
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