Du Canada est arrivé le dégel avec Suuns, quatuor rock aux rayons irradiant dans toutes les directions jusqu’à faire fondre la techno, glacier longtemps contourné par l’indie rock nord-américain…
Je m’explique: depuis une dizaine d’années, on recycle plus de vieux disques que de bouteilles : le garage continue d’enfanter ses héritiers crasseux, Black Lips, Thee Oh Sees… La new wave, le post-punk, la synth-pop… sont souillés impunément et remis en rayon sous forme de chillwave, witch house, new rave… Même Johnny Clegg s’est trouvé une seconde vie avec une bande de New-Yorkais en mocassins, Vampire Weekend, la bouffée d’exotisme pour citadins asphyxiés.
Mais dans ce cycle de la récup, la techno minimale allemande a été épargnée, ou surtout privée de renaître sous une forme qui lui vaudra de connaître sa note sur Pitchfork.
Plutôt ironique quand on sait qu’elle tire elle-même ses origines de Detroit, Chicago, NYC (on vous refait pas l’histoire), charmantes bourgades qui jusqu’à preuve du contraire, sont sur le territoire nord-américain. Ca aura mis du temps mais dans la masse de geeks qui ont aspiré tout ce que la musique d’hier pouvait offrir, quatre Montréalais sur-documentés ont donné leur version pop de Richie Hawtin. Ces héros se sont d’abord fait appeler les Zeroes avant de troquer leur nom pour Suuns, qui signifie pareil mais en thaï. Sur leur premier album Zeroes QC, sorti sur le label Secretly Canadian (Yeasayer, Anthony & the Johnsons, le duo suédois JJ), produit par Jace Lasek des Besnard Lakes, la tension et la nervosité sont contenus dans un minimalisme directement pillé dans la techno.
A l’occasion de leur petite rave pop à la Villette Sonique (dont votre cher petit avion en papier était partenaire) en juin dernier, leur chanteur et guitariste à priori anglophone Ben Shemie répondait à nos questions en français : question d’honneur, pour lui Montréalais, de s’adresser à nous dans la langue de Molière ! Bel effort. Alors tant pis s’il trouve moins facilement les mots pour discourir sur son “grand vocabulaire musical”, acquis grâce à une formation classique, préambule à sa découverte du minimalisme. Et la boucle est bouclée.
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