Ryan Power, c'est ce genre de mec qui fait ses petites affaires dans son coin et dont on découvre généralement le boulot par le côté, sur la foi d'un lien envoyé par un ami ou un collègue estimé. Zonant discrètement dans la marge de la marge de l'indie post-internet (les gens autour de lui s'appellent Blanche Blanche Blanche, Happy Jawbone Family Band, Chris Weisman), ce vrai barbu-poilu de Burlington, Vermont enregistre façon R. Steevie Moore, au pied du pieu et sans se soucier de construire une carrière ou d'égaler en patate les derniers Phoenix ou Strokes.

Et le moins qu'on puisse dire, c'est que ses chansons collent parfaitement à son habitus: labyrinthiques, acrobatiques, gonflées à bloc de références, elles prolongent et exagèrent en gros tout ce que la pop music a commis de nerd et de compliqué depuis 40 ans. Dans les interviews, le garçon cite Scritti Politti ou Prefab Sprout; dans "The Prize" ou les chansons dingues de son précédent I Don't Want To Die, on entend aussi la smooth pop de laboratoire de Steely Dan, les explorations électroniques détendues du slip de la library music européenne, les merveilles arty de la pop brésilienne des 70s - le tout démultiplié au carré par une méchante tendance à l'hyperactivité. Structures en escalier, cascades harmoniques, choeurs contrapuntiques de psychopathe, Ryan Power complique tellement la donne qu'il est plus écouté par les fans de noise que par les gens qui aiment Sufjan Stevens.

La preuve, ses deux derniers disques sont sortis sur NNA Tapes, label cassette-et-vinyls certes aussi basé à Burlington qui nous a plutôt habitués aux drones de synthé. Mais des deux côtés de la barrière, c'est super beau. Premier extrait d'un nouveau gros morceau à sortir bientôt, "The Prize" racole du côté de Stevie Wonder et du Supertramp et rappelle un peu le "I Need You To Hold On While The Sky Is Falling" de Kelley Polar, mon disque de pop compliquée préféré de ces quatre ou cinq dernières années. 

Ryan Power "The Prize"

Jouer juste après Ajouter à la liste

05:29