Deuxième édition pour le festival Loud & Proud qui célèbre, défend, revendique et perpétue avec fierté les cultures queer au sens large des deux termes : on y verra et on y écoutera des concerts, des films, des expositions photo et des conférences d'artistes et d'intellectuels revendiquant leur appartenance à cette scène qui refuse les assignations à un genre, une chapelle ou un mode de pensée que d'autres auraient défini pour elle. 


On reste majoritairement dans notre domaine de compétences en sélectionnant 4 concerts immanquables, et on s'autorise une sortie hors de notre zone de confort avec la projection d'un film qu'on vous encourage, aussi, à ne pas rater. 

MOOR MOTHER

Moor Mother - By The Light (Official Video)

02:13

Black to the future : avec son premier album Fetish Bones, la musicienne de Philadelphie Moor Mother réactualise avec rage et précision l'héritage afrofuturiste. Pas de solos de sax, de sous-texte ésotériques ou de références à Mars et Saturne mais une même volonté d'émancipation par la musique. Afroféministe, activiste sociale, queer revendiquée, Moor Mother a beaucoup de choses à dire et de thèmes à développer - ce qui sera chose faite lors de la rencontre organisée en amont de son concert. 

YVES TUMOR

Yves Tumor - The Feeling When You Walk Away (PAN)

03:00

Si les morceaux du New-yorkais Yves Tumor ont perdu la rage bruitiste de ses débuts pour aller chercher du côté des vrais-faux samples soul et des nappes ambiantes, ses prestations sur scène restent aussi énergiques et anarchiques que celles de son ex-mentor / curateur Mikky Blanco. 'Bullshitter' sublime (ou l'inverse) Tumor s'arrange toujours pour qu'on ne sache pas sur quel pied danser, mais il a sorti avec Serpent Music l'un des plus beaux disques de 2016 et sa réputation de bête de scène n'est plus à faire. 

DEENA ABDELWAHED

Deena Abdelwahed - Ena Essbab

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Après New-York et Philadelphie c'est en Tunisie que les organisateurs de Loud & Proud ont été chercher Deena Abdelwahed. Son premier album Klaab est paru en mars dernier sur InFiné et s'attache selon les mots de la productrice à "chercher le futur de la musique arabe". À l'arrivée des morceaux libres, syncopés et accidentés qui évitent soigneusement tous les pièges de la musique de club aux effets attendus et génériques et des samples orientalisants faciles et entendus partout. À voir, car le futur de la musique arabe est sans doute aussi celui de la club music globale.

JENNIFER CARDINI

Jennifer Cardini - "Venom" (Official Video)

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Moins expérimentale dans son approche que Tumor, Abdelwahed ou Moor Mother mais incontournable dans l'histoire du clubbing parisien, on ne pouvait pas ne pas en placer une pour l'ex-taulière du Pulp Jennifer Cardini. Elle a su développer en une quinzaine d'années une esthétique de la musique et de la fête qui n'a pas pris une ride et dont les derniers rejetons sont le duo israëlien Red Axes ou le Berlinois (via le Mexique et l'Angleterre) Man Power. Pour le dire vite, de la techno qui connaît ses classiques new-wave et post-punk, toujours infaillible pour remplir et faire remuer une piste de danse. 

ALEXIS LANGLOIS

Permettez-nous également de nous éloigner (un poil) de nos compétences musicales, pour vous parler de deux projections qui auront lieu le dimanche à partir de 15h45 à la Gaîté Lyrique. Les deux courts-métrages du jeune réalisateur Alexis Langlois, Fanfreluches et idées noires, et À ton âge, le chagrin c'est vite passé, réalisés tous deux l'année dernière, témoignent d'un goût pour le kitsch certain mais surtout d'une liberté formelle dont on aimerait apercevoir les contours un peu plus souvent aujourd'hui. Le second, une comédie musicale queer dont l'emploi de l'adjectif "déjanté" ne donne pour une fois pas envie de se jeter d'une falaise, raconte l'histoire d'une fille, qui, comme le titre du film l'indique, n'arrive pas à se remettre d'une histoire d'amour compliquée. Mais résumer le film à son pitch n'a absolument aucun sens : sa liberté de ton (un même acteur joue plusieurs personnages à la fois, tout le film est traversé d'une laideur esthétique et d'une hystérie poussées à un paroxysme rigolard) et son rythme tellement enlevé qu'il nous en donnerait la nausée (on imagine que c'est le but), nous disent, mine de rien, qu'on tient là un auteur et surtout une patte en devenir, qui méritent que l'on commence sérieusement à s'attarder sur leur cas.

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Crédit photo bannière :  © Sébastien Dolidon