Ce week-end, une manifestation assez triste avait lieu en Russie. A Moscou, un groupe s’est réuni pour protester contre l’emprisonnement, depuis un peu plus d’un mois, de Leonid Nikolaïev et d’Oleg Vorotnikov, membres du collectif d’artistes anar Voïna (“Guerre”, en russe).
Extrêmes, les performances du groupe avaient mis en rogne le pouvoir central, et pour cause: dans un pays où le rigide gouverne, cette bande de fêlés a semé un sacré merdier.
Il serait hasardeux de retracer ici l’intégralité des actions de Voïna, vous en trouverez de nombreux extraits et détails ici. Cela dit, on ne peut résister à l’envie de vous en décrire quelques unes.
Avant tout, deux mots d’explications. Voïna a été fondé en 2007 par des étudiants en philo moscovites. Anarchistes, anti-flics, anti-Kremlin, ils se lancent rapidement dans une série de happenings tous plus dingues les uns que les autres, avec à l’esprit la ferme intention de déranger.
Leur premier “gros coup” a lieu en 2008. Alors que Medvedev s’apprête à prendre les rênes du pays, Voïna se rend au Musée de la Biologie de Moscou. Dans la salle “Métabolisme et énergie des organismes”, huit d’entre eux se dépoilent et commencent tout bonnement à copuler. Derrière eux, une banderole annonce “Baise pour l’héritier, Petit Ours“, un jeu-de-mots pas facile à traduire. On va tout de même essayer: l’ours en question n’est autre que Medvedev, dont le patronyme est un dérivé du mot medved, soit “ours” en russe.
L’idée était de dénoncer la situation de la Russie en période électorale. Le blogger et performer Alexeï Plutser-Sarno, qui a participé au happening, l’explique ainsi: “Notre but n’est pas nécessairement de n’être que des provocateurs radicaux. Notre but, c’est d’être honnête et de dire ce que nous pensons. Nous pensons que le gouvernement baise les gens, et que les gens aiment ça“.
En images, ça donne ça (attention, ce n’est pas SFW du tout):
Très exposée – et critiquée – médiatiquement, cette action a valu à Voïna ses premiers ennuis. Ce qui n’a en rien changé son objectif: taper le plus possible là où ça fait mal, si possible de la façon la plus spectaculaire qu’il soit. C’est ainsi qu’ils ont pendu symboliquement des activistes LGBT et des travailleurs immigrés, afin de “célébrer l’action de Yuri Luzhkov“, maire de Moscou et xénophobe/homophobe notoire.
C’est également ce qui les a poussé à saluer l’élection de Medvedev en allant lancer du gâteau et du thé à la gueule des flics des commissariats de Moscou. Ou encore à dessiner, en quelques secondes, un pénis géant sur un pont-levant de Saint-Petersbourg, juste en face des locaux du FSB, l’ex-KGB.
L’idée est toute bête, mais son exécution est impressionnante de maîtrise:
Malheureusement pour Voïna, le spectre de la dictature, dont la Russie n’a jamais réussi à se débarrasser totalement, a fini par se rappeler à son bon souvenir. Le 15 novembre dernier, la police débarque dans l’appartement que squatte le groupe et embarque deux de ses leaders. Bon, même si les policiers ont, sur le coup, fait quelques vannes de mauvais goût sur le fait qu’ils allaient les emmener “dans les bois”, ils seraient apparemment bien traités et visibles par leurs camarades. Cela-dit, ils risquent jusqu’à sept ans de prison pour avoir retourné une quinzaine de bagnoles de police durant une nuit de septembre dernier.
La semaine dernière, Voïna a reçu le soutien d’un autre grand agitateur du street-art: Banksy. L’artiste a offert 80.000 £ au groupe en signe de solidarité. Il faut dire qu’il se considère lui-même comme “un vandale”, à la différence prêt qu’il a la chance de vivre, pour sa part, dans une vraie démocratie.
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