Une fois passé le premier soupçon de ré-appropriation culturelle d'un collectif parisien s’entichant de la musique d’un producteur peu connu de Mokopane, la sortie de l’EP sur le label Promesses n’a rien d’étonnant. Le jeune collectif orienté vers tout ce que la musique compte de beats et de riddims (du reggae au hip-hop et la house qui en découle) et leurs hybridations (de la jungle au kuduro) prône un amour de la musique large et dé-ethnocentrée, sans tomber dans le pathos "global groove".

DJ Call Me vient d’Afrique du Sud, et cela a beau crever les yeux après coup, a priori on se sera surtout dit que sa musique sonnait très Soundcloud. La plateforme de partage de musique qualifie caractéristiquement la musique apatride des bedproducers, aux scènes sans frontières et aux influences illimitées, merci Internet, et nous avons là un beau cas de "Soundcloud music". Ce qui change seulement peut-être, c’est le premier degré avec lequel toutes ces influences sont digérées et recrachées, la pauvreté de la production aidant, sonnant comme du PC Music joué au Casio.

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Le grandiloquent des titres des morceaux ("The Return Of DJ Call Me"), le premier degré du titre du EP (+27 73 121 5626, soit le numéro de téléphone de "dj appelez moi"), tout cela est à prendre sans ironie. Et ça s’entend ! Relativement en avance pour son époque, ou pas trop en retard (on nous indique qu’il s’agit de morceaux produits entre 2009 et 2010), on y voit déjà toute cette idée de musique sans chapelle, ou bien d’une chapelle qui aurait mille toits. Une musique produite avec les moyens du bord, toute personnelle, qui doit ressembler à la bibliothèque iTunes du producteur, ou à sa playlist de favoris Youtube.

Dj Call Me - The Return Of Dj Call Me

Une liste drôlement bien fournie -Il y a tout : des nappes presque trance, des filtres dans tous les sens, des cuts bien frustrants que viennent combler des gimmicks virils

renvoyant au plus vulgaire du rap, des petits cœurs r’n’b, des synthés cheap qui font

bizarrement penser à Mammane Sani… Ca laisse travailler l’imagination : on entend

parfois Anne Laplantine qui s'essaierait à faire du hip hop, parfois un remix afrotrap d'un titre eurodance… Les noms et les genres importent peu, il y a tout le pire et le meilleur des années 90, pour un disque assez foutraque et éclaté, la seule constante étant les rythmiques venant tout droit des Caraïbes via la trap.

Un joli pot pourri qui donne le tournis de tant de réminiscences. Le premier degré de

l’entreprise (du nom du producteur à sa page Facebook) n’aide pas non plus, tant il est difficile à voir de nos yeux blasés de cynisme et d’ironie. Si on a encore du mal à se

prononcer sur ce gloubi-boulga d’influences déconcertant, on est touché par sa

sincérité. Le EP a le mérite d’intriguer et Promesses, sur le chemin pourtant bien pavé

allant de promoteur de soirées à label, de proposer autre chose que le label de réédition ou d’edits facile que font ses voisins.

+27 73 121 5626 de DJ Call Me est disponible via le Bandcamp de Promesses