Qu'il est loin le temps où John Maus compilait les railleries et les critiques insultantes de la presse, écrites à l'époque de la sortie de Songs et Love Is Real. Aujourd'hui la musique du ténébreux ricain semble rencontrer une certaine unanimité et on ne va clairement pas s'en plaindre. Triomphe de l'intelligence et d'une certaine exigence à l'époque de The Blaze et de la macronerie généralisée, la synth pop dramatique de Maus est une bouffée d'espoir, rien de moins. Ce Screen Memories arrive à point nommé pour nous rappeler tout ce qui fait la force du musicien: une dramaturgie sans époque et sans lieux qui s'attaque au grand paradigme de la pop réfléchie et réfléchissante (dans les deux sens du terme). 


Si le premier single, The Combine, pouvait faire craindre à une certaine redite teintée d'une tentative italo pas forcément heureuse, c'est bien l'album dans son entièreté qui balaie tous nos scrupules. Moins hystériques que par le passé, parfois plus robotiques et même plus prog, les morceaux de Screen Memories manipulent les clins d'oeil stylistiques avec malice (la basse de "Bombs Away" qui semble avoir été écrite en souvenir de Fleetwood Mac, ) et continue de questionner notre façon de consommer la pop culture et ses ré-ingurgitations successives, de manière de plus en plus docile et passive. 


Adrien Durand

"Tes animaux domestiques vont mourir". C'est une des nombreuses visions apocalyptiques qui émaillent les 40 minutes de Screen Memories, le 4ème long-format du musicien-philosophe-ermite John Maus. La phrase-mantra de "Pets" résume presque à elle seule le miracle du disque : parvenir à être concis, accrocheur et drôle - en gros, pop - quand tout devrait le pousser à la surconceptualisation pontifiante, du doctorat en philosophie politique de Maus au titre de l'album emprunté à Freud et à la référence deleuzienne des paroles de "The People Are Missing".


Mais Maus, pas pote avec Ariel Pink pour rien, est trop malin pour tomber dans le piège du disque "intelligent". Au contraire, le natif du Minnesota a fait dans la brièveté d'ensemble (40 minutes en tout, aucun morceau au-dessus de 3 minutes 30), la répétition des paroles, l'absurdité des arrangements (entre synth pop gothique, post punk hanté et gammes médiévales) pour essayer de retranscrire l'angoisse qui le prend devant l'apocalypse à venir


Comme tous les disques de Maus, Screen Memories est un disque de combat contre lui-même et contre les grands poncifs pop. S'il n'a pas réussi à réinventer son songwriting, il signe le disque le plus brillamment pessimiste entendu depuis We Must Become The Pitiless Censors of Ourselves. Et c'est pas rien.


Arthur Cemeli

JOHN MAUS est en live ce soir à Paris pour une soirée Villette Sonique x My Favourite, complète depuis belle lurette.

Il sera de retour à Paris au festival VILLETTE SONIQUE le 30 mai 2018.

Son album "Screen Memories" est disponible chez Domino.