Pour se distinguer du commun des mortels, les jumeaux Wyatt et Fletcher Shears, en provenance de la huppée Orange County en Californie, ont créé un ilot en forme de blague potache et de faux manifeste esthétique : Vada Vada.
En gros, une bulle dans laquelle ils peuvent laisser libre cours à leurs extravagances de gamins, faire vriller à loisir une musique qui ne peut exister qu'en partant dans tous les sens, en voulant visiblement être à la fois Minutemen et Death Grips, Killing Joke et Mykki Blanco, Ariel Pink et Mr Bungle. Mais si leur formule basse-batterie a sensiblement évolué au cours de leurs quelques années d'existence, il faudra tout de même un jour raccorder leur fil rouge à celui des obscurs mais réjouissants Whirlwind Heat, leurs véritables pères putatifs. Même sens de l'absurde insulaire, même volonté de se créer un espace de liberté dans un entre soi abscons, hors sol et hors format, dont eux seuls comprendraient les codes.
Depuis 2011, The Garden officie en marge sur le circuit indie rock et livre régulièrement des performances et des disques en forme de rébus musicaux, se cassant régulièrement les dents sur scène, sur album, n'arrivant pas tout à fait jusqu'ici à passer la barre du sympathiquement bizarre mais pas tout à fait grisant.
Car à force de ne vouloir ressembler à rien de connu, et donc aspirer un peu à tout vampiriser, les jumeaux ont fini par tirer à blanc. En 2015, ils sortaient enfin leur premier album après des années de maxis plus ou moins hasardeux. On pensait que leur cote allait enfin décoller, mais c'était oublier que leur musique, construite sur du vide, était arrivée à un tel point d'excentricité auto-référencée qu'il était impossible pour eux de communiquer avec qui que ce soit d'autre qu'eux-mêmes.
Mais paradoxalement, c'est ce vide et cette absence d'enjeux qui leur permettent désormais de développer un univers qui n'appartient qu'à eux, et dont l'accumulation de bibelots bizarres glanés un peu partout alimente l'imaginaire de leur punk planet – du nom d'un des maxis de Wyatt Shears publiés sous le nom d'Enjoy.
Mi égéries Dior, mi weirdo post punk, on leur souhaite en tout cas de rester dans cette zone grise encore un petit moment : gageons qu'ils parviendront à terme à amasser assez de joyaux baroques pour que leur entreprise du beau bizarre tienne enfin sur ses deux jambes. En tout cas, certains commencent enfin à se pointer à la fête - et le fait que personne n'y ait pour l'instant été convié est tout à fait secondaire.
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