C'est un disque qu'on a écouté presque tous les jours du mois qui vient de s'écouler, au fond d'une Ford ou à l'ombre d'un pommier, et qui malgré ses airs de b.o. de divagation dystopique se love idéalement dans le creux de l'oreille dans à peu près tous les contextes. Comment se fait-ce? Son essence coule principalement de ses matières, et il ne ressemble à presque rien de connu. Si on s'est beaucoup oublié cet été dans Perceiver, c'est donc sans arrière-pensée pour la techno ou pour l'état de la musique en 2012, et avec la même fascination naïve pour les paysages de bruine et de boue qui y défilent qu'à l'époque où on s'injectait un maxi de Basic Channel au moins une fois par jour.

Pas né du dernier orage, le Belge Peter Van Hoesen n'a bien sûr pas attendu l'Ere de la rigueur pour faire muter sa dance: il a versé dans une première vie dans ce truc dur et passionnant qu'on appelait l'isolationnisme, se prête à l'occasion à des side-projects de pur sound-design et son premier LP sous son nom faisait largement sécession avec à peu près tout le reste de la techno européenne, bande du Berghain y compris. Sur ce deuxième Perceiver, il allonge la sauce et tire les fils qui traînaient et tâche d'oublier complètement le monde dans lequel il vit et travaille. Il va sans dire qu'il va trop loin, et qu'il a bien raison. 

Avis aux amateurs, les tempi sont toujours aussi léthargiques, les nappes aussi vibrionnantes et les arrangements aussi proches de la faille atonale. Avis aux derniers néophythes, entre les paysages désolés de bleeps, Van Hoesen fait tout de même un peu son sort à ce qu'il reste en 2012 de la techno d'échos, qu'elle soit dubby, primale et motorisée ou martiale et saturée. En celà, il rappelle un autre grand explorateur européen, l'inimitable Cristian Vogel, et tord un peu plus le cou à ce clicheton puriste qui dit que la grande techno n'est jamais aussi artistique que quand elle oublie d'être arty. Perceiver est les deux à la fois.

Decoder

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