Je dois avouer un truc: Chad VanGaalen est un caillou dans mon godillot théorique. Comme vous le savez si vous faite partie du cercle de ses admirateurs dévoués, le songwriter Canadien n'a en effet aucune valeur ajoutée, aucun accessoire plastique ou conceptuel à proposer pour augmenter son songwriting con comme la Lune, pétri de religion DIY et de traditions indie rock. Sans aucun système autoréflexif sous le coude sur sa condition de songwriter à l'ère post-postmoderne ni culpabilité (comment ose-t-il?), le grand échalas de Calgary se contente de s'écrire à lui-même des hymnes à chanter sans trop y croire (sa sentence sur son propre art reste qu'il place les sandwiches au-dessus des chansons) mais sans jamais pour autant avoir recours à l'ironie, qu'il chante effectivement de cette voix de fausset empruntée qu'on associe aux chanteurs les plus abominables de notre époque, qui plus est sur des schémas country rock alangui, ponctuellement pervertis par des guitares un peu noisy, des inventions soniques inspirées par l'Age d'or du rock'n'roll ou des petits détours électroniques qui n'avaient déjà plus rien de moderne quand Sufjan Stevens s'y adonnait en 2001.
Surtout, il commet l'acte éhontément littéral et bien entendu anachronique de chercher notre oreille et/ou sa vérité dans la justesse des mélodies qu'il compose et sa manière de les chanter - cette insupportable valeur étalon de la pop music qu'on appelle la sincérité et qu'on sollicite à chaque fois qu'on se trouve acculé dans un cul-de-sac critique.
Pour le dire plus simplement (parce que moi même je n'y vois pas très clair), Chad VanGaalen est un Nord-Américain qui fait au premier degré de la chanson indie nord-américaine d'obédience orthodoxe, et ça me pose un gros problème d'aimer sa musique simplement, sans ambage critique quand 95% de ses contemporains qui pratiquent la même musique avec la même ferveur m'ennuient à mourir.
La conclusion forcément décevante de cet aveu d'échec, elle tient dans le conseil prodigué par un ami samedi soir, en réponse aux pénibles états d'âme de rock plumitif tourmenté par son époque ci-dessus exprimés: "Plutôt que de théoriser, vieux, écris-lui un poème, à Chad VanGaalen, si tu l'aimes".
Comme il va de soi que je vais vous épargner ça, je vous laisse en tête à tête avec les douze excellentes chansons de son excellent nouvel album à sortir tout bientôt sur Sub Pop, éventuellement pour trousser vos propres vers au cas où vous auriez vous-même la fibre littéraire.
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