Trop bourgeois pour être punk, trop arty pour le hard-rock, pas assez pour le post-punk et la no-wave, trop attachés au passé pour se lover dans la new-wave : les groupes que l'on a réunis à partir du milieu des années 80 sous la bannière Paisley Undergound font partie de la première fournée de jeunes gens qui préfèrent se replonger dans la collection de disques de leurs parents plutôt que de s'attaquer bille-en-tête à celle de leurs potes ou de leurs grands-frères. 


Avant d'être un mouvement revivalist, le Paisley Underground est presque une classe sociale à part dans le rock californien, alors en pleine mutation pour le meilleur (Black Flag, The Germs et la scène punk du club The Masque) et pour le pire (la délirante scène hair-metal du Sunset Trip, pour ne citer qu'elle). 


Des excès aux antipodes du mode de vie de ces jeunes gens pas si modernes, tous originaires de banlieues aisées du Sud de la Californie, plus branchés drogues récréationnelles et collection de vinyles que défonce lourde et barres de fer. Les membres de Rain Parade, Three O'Clock, The Bangles ou du Dream Syndicate forment une petite communauté qui partage des vacances, organise des barbecues et communie autour de son amour pour la pop de la fin des années 60. 


Car des harmonies beatlesiennes des quatre filles de The Bangles, au country-rock post-Gram Parsons de The Long Ryders ou au drone velvetien de The Dream Syndicate, tous ont été piocher, en les réadaptant, des éléments dans la pop psychédélique 60's. Un passéisme bon teint, très référencé et un peu naïf qui va séduire Prince, auteur du seul méga-hit du mouvement "Manic Monday" de The Bangles, sorti en 1986. Il ne s'arrêtera pas en si bon chemin puisqu'il signera Three O'Clock sur son label tout en ouvrant un complexe de studios du nom de "Paisley Park" à Minneapolis. 


Une grosse trentaine d'années et quelques reformations plus tard - notamment celle des toujours fringants The Dream Syndicate - on fait le point en 6 morceaux sur les 6 groupes essentiels du Paisley Underground. 

Rain Parade - "No Easy Way Down"


On commence avec un classique. "No Easy Way Down"sonne comme un morceau du Brian Jonestown Massacre qui sonnerait comme un morceau du Velvet Underground si Lou Reed avait troqué John Cale contre un organiste fumeur de pétard et engagé les Byrds comme musiciens de studio. Vous avez du mal à suivre ? Cliquez.   

Three O'Clock - "The Girl With The Guitar"


Pour la petite histoire, c'est Michael Querido, le lutin chanteur/bassiste de Three O' Clock qui aurait donné son nom au mouvement, en parlant de Paisley Undergound (l'underground de cachemire) en référence à la robe que Lina Sedillo portait un soir où elle partageait l'affiche avec Three O'Clock. Pour l'autre petite histoire, au commencement Three O'Clock s'appelait Salvation Army mais a dû changer de nom fissa le jour où la vraie Armée du Salut a menacé de porter plainte. Quatre garçons plein de ressource pour un très bon morceau.  

The Dream Syndicate - "The Days of Wine and Roses"


Tout le romantisme narcotique et revivalist du Paisley Underground encapsulé en un morceau de The Dream Syndicate (qui aurait aussi mérité de changer de nom en cours de route, plainte ou pas). S'il n'a jamais atteint le succès commercial de The Bangles, The Dream Syndicate reste le groupe étendard du Paisley Underground, notamment à cause de cet impeccable premier LP. 

The Bangles - "Hero Takes a Fall"


Il en fallait bien un : The Bangles aura été le seul groupe du Paisley Underground à avoir réussi à faire la transition vers le mainstream grâce à un coup de main de Prince, donc, auteur-compositeur de "Manic Monday". D'après leur chanteuse c'est en tombant par hasard sur le clip de "Hero Takes a Fall" qu'il est devenu fan.

Green on Red - "Gravity Talks"


The Doors emmené par Eric Burdon ? C'était sans doute la note d'intention de Green On Red pour "Gravity Talks".  Le plus garage des groupes du Paisley Underground accompagne le titre d'un clip sous haute influence Isaac Newton, pour bien nous rappeler que si les racines de leur musique sont résolument sixties, ils restent des mecs des années 80. 

The Long Ryders - "Lights of Downtown"


Pas le groupe le plus brillant du lot, celui aussi dont les influences sont les plus évidentes (des intros et des rouflaquettes chopées chez Buffalo Springfield, des arpèges jangles récupérés chez les Byrds), les Long Ryders emmenés par Stephen McCarthy sont la caution americana du Paisley Underground, moins Prince-compatibles que les Bangles ou que Three O'Clock mais annonciateurs de l'alt-country qui va débouler dans les années 90. So long, Stephen.