Dans ma tête et celle de quelques autres, le monde est coupé en deux. Il y a les gens qui aiment Tilt et The Drift et ceux qui ne les aiment pas. Ceux qui goûtent leurs tentatives démentes d'ouvrir les Portes de l'Enfer et ceux qui préfèrent Bon Iver.
En bon "rock critic", je trace ma ligne à la truelle mais ces deux disques durs et dingues font partie de cette catégorie d'objets ("les oeuvres d'art") qui forcent presque le partisanisme, alourdissent automatiquement la parole critique d'une tonne de fiente morale et polarisent toutes les discussions des deux côtés d'une ligne de démarcation infranchissable.
Exilé depuis 1978 (le fameux Nite Flights des Walker Brothers) dans un territoire obscur où chaque parole, chaque émission de son revêtent la crucialité d'un rituel magique, Scott Walker est le contraire d'un illuminé qui beuglerait dans sa cave contre la déliquescence du monde. A une époque où la pop music perd chaque seconde qui passe un peu plus de sa force vitale et de sa capacité à changer la vie, sa version absolutiste, presque littérale de l'idiome pop (son+voix = chanson) est plus cruciale que jamais.
Alors peu importe que ses disques soient faits avec des petites ritournelles aimables ou des bruits de pet, des reprises de Brel ou des rythmes joués sur de la viande ou de la quincaillerie. Peu importe qu'on capte quelque ou pas de ces codes et de ses secrets, pourvu qu'il soit nécessaire d'y consacrer du temps et de la santé mentale. Scott Walker est peut-être le dernier chanteur pop à oser faire des disques en forme de chasse au trésor où c'est la chasse elle-même qui est le trésor. Matez donc ce trailer et osez me dire que vous n'avez pas les poils qui se hérissent sur les avant bras.
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