“Donne-moi de l’argent et je te ferais un album de ce genre de merde avant-garde” : les boulets de canons sont chargés et Ganesh Seshadri, aka Bid, ne se prive pas pour tirer. Plus de trente ans après la formation des Monochrome Set à Londres en 1978, le frontman a la cinquantaine et épingle son époque, à commencer par le punk, dont il s’est vite démarqué au lendemain de son âge d’or à l’instar de Wire ou Throbbing Gristle.
Tous les groupes qui pullulent alors “juste pour le style” ne l’intéressent pas du tout, car tout ce qu’il veut, c’est écrire des chansons dont on se souviendra dix ans plus tard. Et on n’oubliera effectivement pas l’ironie impeccable de titres absurdes et fins comme Jet Set Junta, certains s’offrant même une petite caracole en tête des charts en concurrence avec Siouxsie & The Banshees grâce à l’album Strange Boutique.
The Monochrome Set se formaient peu de temps après l’arrivée de Bid dans The B-Sides avec Andy Warren et le guitariste canadien Lester Square, l’un des nombreux étudiants planqués en école d’art à l’époque révolue où les Britons étaient payés pour faire acte de présence. Il y fait ses classes avec le bassiste Stuart Goddard, qui quitte vite le groupe pour devenir l’un des guignols les plus sexy et kitsch des 80′s avec la glam-new wave d’Adam & The Ants. Quand les punks prenaient la pose et hachaient les mots, The Monochrome Set arrivent sur scène dans des costumes dignes des Monty Python et projettent des vidéos expérimentales à l’aide du réalisateur Tony Potts et s’attire un public autant arty que skinhead.
Leurs albums sortent éparpillés sur différents labels : des débuts sur la division Din Discs de Virgin en 1981, puis Cherry Red, Rough Trade, Warner, jusqu’au renoncement devant la pression de céder à la cochonnerie FM. The Monochrome Set se paient alors quelques traversées du désert : en 1985, puis une seconde en 1998. Persistant, le groupe se reforme pour des lives depuis 2008.
Ce qui les mène à leur venue au festival BB Mix en octobre à Boulogne-Billancourt. On a pu y admirer la courbe parfaite de la moustache du guitariste Lester Square, mais surtout collecter le précieux venin au goût amer de Ganesh Seshadri. Il crache volontiers sur son époque dont il n’a pas non plus oublié les avantages, comme l’esprit de fête qui régnait et permettait aux groupes de se faire connaître en une poignée de concerts. Quand on le pousse un peu, il balance aussi sur la dépression systématique des groupes de Manchester, puis sur Dan Treacy des Television Personalities, dont il haït les nouveaux albums. Contrairement à lui, Bid se défend d’écrire des chansons qui font référence à une période précise. Un choix qu’il nous fait regretter tout le long de notre entretien car même si aucun nouvel album de The Monochrome Set est en préparation, on irait bien se nourrir de son poison enrobé dans ses titres “presque punk” et “mainstream”, comme il consent à les décrire.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.